Par quelle autorité ? -

Scribes et Pharisiens,
James Tissot (Nantes, 1836 - Chenecey-Buillon, 1902),
Illustration pour « La vie du Christ », Gouache sur papier, 17 x 26,4 cm, 1886-1894,
Brooklyn Museum of Art, Brooklyn New-York (U.S.A.).
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 21, 23-27)
En ce temps-là, Jésus était entré dans le Temple, et, pendant qu’il enseignait, les grands prêtres et les anciens du peuple s’approchèrent de lui et demandèrent : « Par quelle autorité fais-tu cela, et qui t’a donné cette autorité ? » Jésus leur répliqua : « À mon tour, je vais vous poser une question, une seule ; et si vous me répondez, je vous dirai, moi aussi, par quelle autorité je fais cela : Le baptême de Jean, d’où venait-il ? du ciel ou des hommes ? » Ils faisaient en eux-mêmes ce raisonnement : « Si nous disons : “Du ciel”, il va nous dire : “Pourquoi donc n’avez-vous pas cru à sa parole ?” Si nous disons : “Des hommes”, nous devons redouter la foule, car tous tiennent Jean pour un prophète. » Ils répondirent donc à Jésus : « Nous ne savons pas ! » Il leur dit à son tour : « Moi, je ne vous dis pas non plus par quelle autorité je fais cela. »
Méditation
En célébrant aujourd’hui saint Jean de la Croix, on pourrait se demander que vient faire ici une méditation sur l’autorité ! Pourtant, Jean en fit preuve dans sa mission. Il suffit de se pencher sur l’étymologie de ce mot.
« Autorité » est un terme provenant du nom latin auctoritas. L’auctoritas romaine était l’apanage du Sénat, qui n’avait pas de pouvoir décisionnaire ni de pouvoir exécutif, contrairement à la potestas (pouvoir), qui imposait la force au peuple. « Potestas in populo, auctoritas in senatu », dit d’ailleurs l’adage populaire depuis Cicéron. Le verbe augeo, dont provient l’auctoritas, signifie faire naître, augmenter, produire à l’existence.
Ainsi, faire preuve d’autorité revient à dire que l’on a du crédit, que l’on est écouté et respecté parce que notre parole a du sens car elle est éprouvée et qu’elle ne s’exerce pas, tel un pouvoir autocratique, mais pour élever et faire grandir l’autre. N’est-ce pas ce que fit Jean de la Croix dans ses fondations, mais surtout dans sa démarche spirituelle : aider ses frères à trouver la lumière divine au milieu des ténèbres de « la nuit obscure ».
Jésus va ainsi prendre les Juifs à leur propre piège : quelle est votre autorité, avant de vous interroger sur la mienne ? Quelle parole prononcez-vous sur Jean le Baptiste ? Et les Pharisiens sont pris dans leurs propres filets : ils ne parlent pas avec autorité mais avec pouvoir.
Si celui qui a autorité par sa parole s’exprime, c’est dans l’unique objectif de faire grandir ses frères, de les élever. Mais pour cela, il doit être écouté. Un autre mot peut nous éclairer : obéissance. Le mot vient du verbe latin oboedire (« prêter l'oreille »). Jésus a-t-il une parole d’autorité dans ma vie ? Ai-je foi en Lui ? En ce cas, comment ne pas l’écouter, lui prêter l’oreille, lui obéir ? Et lui obéir sans réticence, quel que soit le chemin qu’il nous fera prendre, même celui de la Croix, comme l’a demandé l’oraison d’ouverture : Dieu qui inspiras à ton prêtre saint Jean un extraordinaire amour de la croix et le renoncement total à lui-même, fais qu’en nous attachant à le suivre, nous parvenions à la contemplation éternelle de ta gloire.