Je suis le froment de Dieu ; je dois être moulu sous la dent des bêtes pour devenir le pain immaculé du Christ.

Saint Ignace d’Antioche
Charles Cahier (Paris, 1807 - Paris, 1882)
Gravure extraite du livre "Caractéristiques des saints dans l’art populaire »
Paris, Éditions Poussielgue Frères, 1867
Saint Ignace d'Antioche. Lettre aux Éphésiens, 9-10, trad. T. Camelot révisée, Paris, Cerf, coll. « Sources chrétiennes » 10, 1969, p. 65-67.
Vous êtes les pierres du temple du Père, préparés pour la construction de Dieu le Père, élevés jusqu'en haut par la machine de Jésus Christ, qui est la croix, vous servant comme câble de l'Esprit Saint ; votre foi est votre treuil et la charité est le chemin qui vous élève vers Dieu. Vous êtes donc aussi tous compagnons de route, porteurs de Dieu et porteurs du temple, porteurs du Christ, porteurs des objets sacrés, ornés en tout des préceptes de Jésus Christ. Avec vous, je suis dans l'allégresse, puisque j'ai été jugé digne de m'entretenir avec vous par cette lettre et de me réjouir avec vous de ce que, vivant d'une vie nouvelle, vous n'aimez rien que Dieu seul. Priez sans relâche (1 Th 5, 17) pour les autres hommes. Car il y a en eux espoir de repentir, pour qu'ils arrivent à Dieu. Permettez-leur au moins d'être instruits par vos actes. En face de leurs colères, vous, soyez doux ; de leurs vantardises, vous, soyez humbles ; de leurs blasphèmes, vous, montrez vos prières ; de leurs erreurs, vous, soyez fermes dans la foi (Col 1, 23) ; de leur sauvagerie, vous, soyez paisibles, sans chercher à les imiter. Soyons leurs frères par la bonté et cherchons à être les imitateurs du Seigneur (1 Th 1, 6).
Méditation
Nous connaissons trop peu les Pères de l’Église dont Ignace fut un des membres éminents, d’autant plus qu’il fut certainement un des disciples des apôtres Pierre et Jean. Plusieurs de ses lettres sont attestées, alors que d’autres semblent être apocryphes. Ce saint homme s’attendait à être condamné et conduit à Rome où il pensait mourir au cirque « sous la dent des lions », comme le dit le frontispice de cette méditation. Il ne recula pas devant le martyr, et même, plutôt que de sombrer dans la tristesse ou le découragement, il exhorta ses frères à s’offrir eux-mêmes en sacrifice. Ainsi, il considérait qu’en s’offrant aux dents des lions, il deviendrait le grain broyé qui ferait le pain de l’eucharistie.
Dans les mois prochains, une nouvelle traduction du Missel Romain sera disponible et introduira quelques modifications pour rendre le texte plus lisible, plus compréhensible, mais surtout plus juste théologiquement. Ainsi, avant l’oraison de l’offertoire, le dialogue était, jusqu’à ce jour, le suivant :
V/ Prions ensemble, au moment d'offrir le sacrifice de toute l'Église.
R/Pour la gloire de Dieu et le salut du monde.
Il deviendra, tel le texte traduit du latin :
V/ Priez, frères et soeurs, que mon sacrifice et le vôtre soit agréable à Dieu le Père tout-puissant.
R/ Que le Seigneur reçoive de vos mains ce sacrifice à la louange et à la gloire de son nom, pour notre bien et celui de toute l’Église.
En plus d’être fidèle au sens théologique, cette nouvelle traduction nous rapprochera de ce que proclamait Ignace : nous sommes, nous aussi, le sacrifice offert à Dieu pour notre bien et celui de l’Église. En répondant à l’invite du célébrant, nous nous offrons nous-mêmes tel le grain de blé moulu et broyé par la dent du lion pour devenir pain eucharistique. Puisse le Seigneur nous aider à en prendre mieux conscience et ne plus répondre distraitement à cet appel de Dieu.