Il les trouvait dix fois supérieurs ! -

Daniel devant Nabuchodonosor,
Salomon Koninck (Amsterdam, 1609 - Amsterdam, 1656),
Huile sur toile, 165 x 165 cm, date inconnue,
Kedleston Hall. - National Trust, Quarndon (Royaume-Uni)
Lecture du livre du prophète Daniel (Dn 1, 1-6.8-20)
La troisième année du règne de Joakim, roi de Juda, Nabucodonosor, roi de Babylone, arriva devant Jérusalem et l’assiégea. Le Seigneur livra entre ses mains Joakim, roi de Juda, ainsi qu’une partie des objets de la maison de Dieu. Il les emporta au pays de Babylone, et les déposa dans le trésor de ses dieux. Le roi ordonna à Ashpénaz, chef de ses eunuques, de faire venir quelques jeunes Israélites de race royale ou de famille noble. Ils devaient être sans défaut corporel, de belle figure, exercés à la sagesse, instruits et intelligents, pleins de vigueur, pour se tenir à la cour du roi et apprendre l’écriture et la langue des Chaldéens. Le roi leur assignait pour chaque jour une portion des mets royaux et du vin de sa table. Ils devaient être formés pendant trois ans, et ensuite ils entreraient au service du roi. Parmi eux se trouvaient Daniel, Ananias, Misaël et Azarias, qui étaient de la tribu de Juda. Daniel eut à cœur de ne pas se souiller avec les mets du roi et le vin de sa table, il supplia le chef des eunuques de lui épargner cette souillure. Dieu permit à Daniel de trouver auprès de celui-ci faveur et bienveillance. Mais il répondit à Daniel : « J’ai peur de mon Seigneur le roi, qui a fixé votre nourriture et votre boisson ; s’il vous voit le visage plus défait qu’aux jeunes gens de votre âge, c’est moi qui, à cause de vous, risquerai ma tête devant le roi. » Or, le chef des eunuques avait confié Daniel, Ananias, Azarias et Misaël à un intendant. Daniel lui dit : « Fais donc pendant dix jours un essai avec tes serviteurs : qu’on nous donne des légumes à manger et de l’eau à boire. Tu pourras comparer notre mine avec celle des jeunes gens qui mangent les mets du roi, et tu agiras avec tes serviteurs suivant ce que tu auras constaté. » L’intendant consentit à leur demande, et les mit à l’essai pendant dix jours. Au bout de dix jours, ils avaient plus belle mine et meilleure santé que tous les jeunes gens qui mangeaient des mets du roi. L’intendant supprima définitivement leurs mets et leur ration de vin, et leur fit donner des légumes. À ces quatre jeunes gens, Dieu accorda science et habileté en matière d’écriture et de sagesse. Daniel, en outre, savait interpréter les visions et les songes. Au terme fixé par le roi Nabucodonosor pour qu’on lui amenât tous les jeunes gens, le chef des eunuques les conduisit devant lui. Le roi s’entretint avec eux, et pas un seul n’était comparable à Daniel, Ananias, Misaël et Azarias. Ils entrèrent donc au service du roi. Sur toutes les questions demandant sagesse et intelligence que le roi leur posait, il les trouvait dix fois supérieurs à tous les magiciens et mages de tout son royaume.
Sainte Cécile, Vierge romaine martyrisée en 230
Nous savons peu de chose sur cette grande figure de l'hagiographie féminine. L'histoire nous assure qu'elle appartenait à une grande famille romaine : les "Cecilii", qu'elle était chrétienne, qu'elle aidait les premiers papes de ses deniers et que, lorsque son époux se convertit, ils donnèrent à l'Église un terrain devenu cimetière : les catacombes de Saint Calixte où elle eut le privilège d'être enterrée au milieu des papes. Au IXe siècle, ses reliques furent transférées dans une église romaine proche du Tibre : Sainte Cécile au Transtévère. Hors de là, ce ne sont qu'embellissements d'une poétique admiration. La Cécile légendaire, promue vierge et martyre, a suppléé la Cécile historique, dame romaine opulente et donatrice secourable qui « chantait dans son cœur la gloire de Dieu ». Ce qui, en passant, est une belle référence pour tous ceux qui, chanteurs et chanteuses, veulent se mettre sous son patronage.
O sainte bien-aimée, je contemple ravie,
Le sillon lumineux qui demeure après toi.
Je crois entendre encore ta douce mélodie.
Oui, ton céleste chant arrive jusqu'à moi.
Sainte Thérèse de Lisieux - Poésie en l'honneur de sainte Cécile
Méditation
Pour cette dernière semaine avant que ne débute dimanche le temps de l’Avent, nous entamons le livre du prophète Daniel. Une petite présentation faite par le Centre Sèvres (Jésuites) :
Dans le déroulé des livres selon la tradition juive, le livre de Daniel figure parmi les Écrits sapientiels entre Esther et Esdras. Selon la traduction grecque de la LXX, il est le quatrième des grands prophètes après Isaïe, Jérémie et Ézéchiel. Du point de vue de la tradition prophétique, Daniel à la suite d’Ézéchiel est imprégné du courant apocalyptique qui cherche à actualiser l’eschatologie de la fin des temps dans l’histoire. Il s’agit dès lors de faire la part qui revient à l’artifice littéraire – le texte dans son état définitif est plus tardif que le retour d’exil dont il traite – et à l’histoire – il relève de l’époque hellénistique (333-63 ; la rédaction de Daniel est datée de 167-164 av. J.-C.). Le livre se trouve dès lors teinté de Sagesse. Jusque dans l’Apocalypse de Jean, genre apocalyptique et genre sapientiel sont en effet indissociables au point d’apparaître comme la caractéristique de ce courant : la Sagesse liée à l’origine est inséparable du jugement qui implique la fin ; pas d’Alpha sans Oméga, pas de Premier sans Dernier (Ap 1,8 ; 21,6 ; 22,13). Il convient de démêler le fond historique de ces chapitres de leur enseignement qui se veut universaliste, c’est-à-dire valable pour Israël comme pour les Nations, puisqu’il est fondé sur la création, au fondement de l’histoire. À ce titre son message se trouve à l’unisson du Nouveau Testament. Jésus est un personnage historique et la Parole par qui tout est créé (Jn 1,1).
Effectivement, nous allons croiser cette semaine quelques passages apocalyptiques. Mais aujourd’hui, la liturgie nous propose de découvrir la jeunesse de Daniel et de ses compagnons. Ainsi, après avoir assiégé et pillé la ville, le roi Nabuchodonosor demande qu’on lui « fournisse » de jeunes garçons qu’il veut « de race royale ou de famille noble (et) devaient être sans défaut corporel, de belle figure, exercés à la sagesse, instruits et intelligents, pleins de vigueur, pour se tenir à la cour du roi et apprendre l’écriture et la langue des Chaldéens ». Précis ! Mais que veut-il en faire ? Des pages, des esclaves, des conseillers, voire des amants ? Toujours est-il que le petit Daniel se retrouve enfermé avec trois de ses amis : Ananias, Misaël et Azarias. Sous la surveillance d’un eunuque, ils sont détenus dans l’andrôn du palais (version masculine du gynécée). le chef des eunuques est chargé de les préparer, les former, les engraisser, les fortifier durant trois ans, tel le temps de ministère de Jésus avec ses apôtres…
Mais ces adolescents refusent de se nourrir de viandes sacrifiées aux idoles et préfèrent se nourrir, avec l’accord discret du chef des eunuques, uniquement de légumes (sûrement cinq fruits et légumes par jour !) Et les voici en meilleure forme que les autres garçons nourris des mets de la table royale. Mais ce n’est pas que l’effet d’un régime équilibre digne d’une diététicienne. C’est d’abord l’effet de la grâce divine : Dieu avait bien un projet pour eux afin de désarmer les folies du roi. Comme Jésus, ils grandissent épanouis : « Quant à Jésus, il grandissait en sagesse, en taille et en grâce, devant Dieu et devant les hommes » (Lc 2, 52).
Mais voilà venu le moment de les présenter au roi. Nous pouvons imaginer que ces enfants sont devenus de jeunes hommes après ces trois années de détention dans l’andrôn. Le texte précise : « Le roi s’entretint avec eux, et pas un seul n’était comparable à Daniel, Ananias, Misaël et Azarias. Ils entrèrent donc au service du roi. Sur toutes les questions demandant sagesse et intelligence que le roi leur posait, il les trouvait dix fois supérieurs à tous les magiciens et mages de tout son royaume. » Le tableau de Salomon Koninck nous montre doc le petit Daniel à genoux devant le trône du roi paré de ses plus beaux atours, et entouré de sa cour et de ses savants consultants leurs manuels pour vérifier les réponses de l’adolescent. Mais comment ne pas être surpris par ce grand miroir elliptique derrière le Roi ? Est-ce l’œil de Dieu qui veille sur son prophète ? Ou le miroir de son âme ? Ou encore la fenêtre sur l’avenir qui permettra à Daniel d’interpréter songes et rêves ?
Notons que le roi ne s’inquiète apparemment pas de leur beauté, ni de leur forme physique. Tout ce qui l’intéresse est leurs capacités intellectuelles et leurs connaissances. Et là, il est époustouflé, au point de les trouver dix fois supérieurs aux meilleurs de ses savants. Comment ne pas penser à Jésus devant les docteurs (Lc 2, 42-47) : « Quand il eut douze ans, ils montèrent en pèlerinage suivant la coutume. À la fin de la fête, comme ils s’en retournaient, le jeune Jésus resta à Jérusalem à l’insu de ses parents. Pensant qu’il était dans le convoi des pèlerins, ils firent une journée de chemin avant de le chercher parmi leurs parents et connaissances. Ne le trouvant pas, ils retournèrent à Jérusalem, en continuant à le chercher. C’est au bout de trois jours qu’ils le trouvèrent dans le Temple, assis au milieu des docteurs de la Loi : il les écoutait et leur posait des questions, et tous ceux qui l’entendaient s’extasiaient sur son intelligence et sur ses réponses. »
Ainsi, comme l’écrivait le texte en introduction, Daniel est une préfiguration de Jésus.