Ravive le don gratuit de Dieu -

Paul délivre ses lettres aux disciples Timothée et Silas pour les porter au monde entier (Latin: Paulus tradit epistolas discipulis suis Timotheo et Silee deferendas per universum orbem),
Anonyme,
Mosaïques du XIIe siècle,
Diaconium de la cathédrale Santa Maria Nuova, Monreale (Sicile, Italie)
Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre à Timothée (2 Tim 1, 1-8)
Paul, apôtre du Christ Jésus par la volonté de Dieu, selon la promesse de la vie que nous avons dans le Christ Jésus, à Timothée, mon enfant bien-aimé. À toi, la grâce, la miséricorde et la paix de la part de Dieu le Père et du Christ Jésus notre Seigneur. Je suis plein de gratitude envers Dieu, à qui je rends un culte avec une conscience pure, à la suite de mes ancêtres, je lui rends grâce en me souvenant continuellement de toi dans mes prières, nuit et jour. Me rappelant tes larmes, j’ai un très vif désir de te revoir pour être rempli de joie. J’ai souvenir de la foi sincère qui est en toi : c’était celle qui habitait d’abord Loïs, ta grand-mère, et celle d’Eunice, ta mère, et j’ai la conviction que c’est aussi la tienne. Voilà pourquoi, je te le rappelle, ravive le don gratuit de Dieu, ce don qui est en toi depuis que je t’ai imposé les mains. Car ce n’est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d’amour et de pondération. N’aie donc pas honte de rendre témoignage à notre Seigneur, et n’aie pas honte de moi, qui suis son prisonnier ; mais, avec la force de Dieu, prends ta part des souffrances liées à l’annonce de l’Évangile.
Saints Timothée et Tite
L'Église en Occident les unit comme disciples très chers de saint Paul qui leur confie la charge épiscopale dans l'Église naissante. Timothée, que Paul appelle "son vrai fils dans la foi" est né en Asie mineure d'un père grec et d'une mère juive. Converti lors de la première mission de saint Paul, il devient son disciple et son collaborateur fidèle. Pour le faire accepter des juifs et des judéo-chrétiens, Paul le fait circoncire. Timothée partagera la première captivité de Paul qui, lors de sa seconde captivité, le réclamera encore. Selon la tradition, saint Timothée serait mort évêque d'Éphèse.
Tite est un grec converti, mais non circoncis. C'est un diplomate habile à qui Paul confie des missions délicates, tout en lui demandant d'être ferme et catégorique. Il ramènera la paix dans la communauté de Corinthe et organisera les communautés naissantes de Crète. La tradition nous dit en effet qu'il meurt évêque de Cnossos en Crète.
Si je t'ai laissé en Crète, c'est pour que tu finisses de tout organiser et que, dans chaque ville, tu institues des Anciens comme je te l'ai commandé. Saint Paul à Tite - Tt 1, 5
Méditation
Notre plus grand ennemi n’est-il pas la routine ? Elle nous endort doucement et peut même nous faire sombrer dans ce que les Pères neptiques (la nepsie est la sobriété de l’âme) appellent l’acédie. Sur internet, nous pouvons en lire cette définition :
L’acédie est un terme rare ou savant calqué du grec et employé dans le domaine moral, religieux et psychologique pour signifier un manque de soin. La notion fut ensuite christianisée par les pères du désert pour désigner un manque de soin pour sa vie spirituelle. La conséquence de cette négligence est un mal de l’âme qui s’exprime par l’ennui, ainsi que le dégoût pour la prière, la pénitence et la lecture spirituelle. Quand l'acédie devient un état de l’âme qui entraîne une torpeur spirituelle et un repli sur soi, elle est une maladie spirituelle.
Notre foi, au début de notre parcours spirituel, peut être vive, ardente. Et nous ressentons toutes les grâces. Mais, le temps passant, les soucis nous accablant, ou les distractions, elle s’étiole doucement et parfois se réduit à une simple pratique hebdomadaire, au mieux quotidienne. Quelques prières, la messe de temps en temps, un peu de charité, et tout va bien ! Peut-être est-ce aussi le cas de Timothée… Comme si Paul lui rappelait les moments éclatants et vigoureux de sa foi transmise par sa grand-mère puis sa mère. Mais qui semble aujourd’hui plus ténue, plus effacée. Peut-être est-ce du à une certaine peur de Timothée. Peur d’annoncer sa foi et de se voir non seulement rabrouer (ce qui peut aussi être notre cas aujourd’hui) mais risquer aussi de trouver la mort en martyr (ce qui est moins le cas pour nous…). Peur de la souffrance, bien naturelle. Est-ce un début d’acédie, de manque de soin de sa vie spirituelle avec les conséquences de cette négligence évoquée plus haut ?
Difficile de porter un jugement sur la base unique de cette lettre de Paul. Encore plus de « juger » un saint porté sur les autels de l’Église ! Mais, prenons-en simplement de la graine, d’une graine plus petite que celle du sénevé et qui peut devenir un grand arbre de la foi. Quelle graine, donc ? La graine de l’esprit, et même de l’Esprit-Saint : « Car ce n’est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d’amour et de pondération. » Force, amour et pondération.
Ainsi, nous devrions graver ce verset sur notre porte : « Voilà pourquoi, je te le rappelle, ravive le don gratuit de Dieu, ce don qui est en toi depuis que je t’ai imposé les mains. » Depuis que Dieu nous a imposé les mains au jour de notre baptême —imposition renouvelée lors de notre confirmation, voire de notre ordination — depuis ce jour, Dieu nous a fait des dons. D’abord celui de la foi, don qui nous est commun. Puis des dons qui nous sont personnels et qui indiquent discrètement ce que Dieu attend de nous :
Il y a diversité de dons, mais le même Esprit ; diversité de services, mais le même Seigneur ; diversité d’opérations, mais le même Dieu qui opère tout en tous. Or, à chacun la manifestation de l’Esprit est donnée pour l’utilité commune. (1 Corinthiens 12.4-7)
En effet, comme nous avons plusieurs membres dans un seul corps, et que tous les membres n’ont pas la même fonction, ainsi, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps en Christ et nous sommes tous membres les uns des autres. Mais nous avons des dons différents, selon la grâce qui nous a été accordée. (Romains 12.4-6)
À partir de là, ne pourrions-nous pas, nous aussi, raviver notre foi et notre vie spirituelle, en prendre soin pour sortir de notre acédie ? « Voilà pourquoi, je te le rappelle, ravive le don gratuit de Dieu, ce don qui est en toi depuis que je t’ai imposé les mains. » Une nouvelle fois : courage et hauts les coeurs ! « Paradis aux hardis » disait le Père Sevin.