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Dimanche des Rameaux

Trois regards…



Chapelle 19 : « L’entrée du Christ à Jérusalem »

Gaudenzio Ferrari (Valduggia, v. 1471 - Milan, 1546)

Sculptures de plâtre sur structure de bois et métal, peinture, taille réelle

Sacro Monte, Varello (Italie)


Évangile de Jésus-Christ selon Saint Matthieu (Mt 21, 1-11)

Jésus et ses disciples, approchant de Jérusalem, arrivèrent en vue de Bethphagé, sur les pentes du mont des Oliviers. Alors Jésus envoya deux disciples en leur disant : « Allez au village qui est en face de vous ; vous trouverez aussitôt une ânesse attachée et son petit avec elle. Détachez-les et amenez-les moi. Et si l’on vous dit quelque chose, vous répondrez : “Le Seigneur en a besoin”. Et aussitôt on les laissera partir. » Cela est arrivé pour que soit accomplie la parole prononcée par le prophète : Dites à la fille de Sion : Voici ton roi qui vient vers toi, plein de douceur, monté sur une ânesse et un petit âne, le petit d’une bête de somme. Les disciples partirent et firent ce que Jésus leur avait ordonné. Ils amenèrent l’ânesse et son petit, disposèrent sur eux leurs manteaux, et Jésus s’assit dessus. Dans la foule, la plupart étendirent leurs manteaux sur le chemin ; d’autres coupaient des branches aux arbres et en jonchaient la route. Les foules qui marchaient devant Jésus et celles qui suivaient criaient : « Hosanna au fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Hosanna au plus haut des cieux ! » Comme Jésus entrait à Jérusalem, toute la ville fut en proie à l’agitation, et disait : « Qui est cet homme ? » Et les foules répondaient : « C’est le prophète Jésus, de Nazareth en Galilée. »


Ce que je vois

Une des traditions du Nord de l’Italie est de proposer aux fidèles un parcours spirituel grâce à des chapelles disséminées dans la montagne. Le Sacro Monte di Varallo est certainement un des plus célèbres et conte en 45 scènes, constituées de plus de 800 personnages grandeur nature, l’histoire du Christ, de l’Annonciation à la Mise au tombeau.


La représentation de la scène est particulièrement proche de l’évangile de Matthieu. On y voit au centre Jésus monté sur son ânesse, accompagnée à ses côtés de l’ânon. Devant lui, la foule dépose des manteaux sur le sol ; rameaux en main, ils acclament Jésus. Des enfants, juchés dans les arbres, décrochent de nouvelles branches. Malheureusement, la photographie ne permet pas de distinguer le soldat sur le haut de la porte qui semble crier « Qu’est-ce que c’est ? »


Qu’est-ce que c’est ?

Tant l’évangile de Matthieu que la représentation qui en est ici faite semblent illustrer au mieux notre question.

  • Monté sur l’ânesse, il est le Roi, humble, annoncé par le prophète Zacharie (Za 9, 9).

  • Acclamé, il est le Sauveur (rappelons que la parole Hosanna veut dire « Sauve-nous ! » en hébreu). Et les rameaux signifient notre désir d’être replanté (rameaux verts et sans racines que nous sommes) dans le Paradis.

  • Il est le Messie, devant qui chacun s’agenouille, petits et grands.

  • Il est le Fils de l’Homme, pleinement Dieu et pleinement homme, comme le rappellent les deux couleurs de son manteau, le rouge de sa divinité et le bleu de son humanité. Une autre allusion est faite à la Trinité par les trois doigts que Jésus tend, comme pour indiquer qu’il est le Fils de l’Homme aux côtés du Père et de l’Esprit.

  • Il est le Rabbi, celui qui nous explique les Écritures, tenues en main par l’homme au premier plan.

  • Il est le Seigneur, devant qui l’on retire son vêtement, comme lui-même le fera quelques jours plus tard avant de se laisser accrocher à la Croix.

L’image pourrait aussi nous faire découvrir d’autres dénominations christiques.

  • Il est la Porte (celle par laquelle il vient de passer à droite).

  • Il est le Chemin, celui qu’il parcourt humblement sur la terre des hommes pour nous mener au Royaume.

Les bouquets de rameaux que cueillent les enfants s’appellent des lulav (en hébreu) et sont constitués de quatre types de branches : une branche de palmier-dattier, trois branches de myrte parfumée, deux branches de saules, une branche de cédrat. Ce bouquet symbolise l’unité du peuple autour de la connaissance de la Torah (les branches parfumées) et de ses actes (les fruits). Jésus est celui qui va incarner véritablement cette unité comme Maître du Sabbat, mais aussi Rabbi qui réalise les Écritures.


Il est enfin une curiosité sémantique propre au texte de Matthieu et reprise dans la scène. C’est celle de cet homme (hors de champ, il est en haut de la porte de droite) qui va crier « Qu’est-ce que c’est ? » Surpris du bruit de la foule, regardant Jésus entrer à Jérusalem, il s’interroge. Mais, la traduction de cette question en hébreu peut nous rappeler bien des choses : Man hou. C’est la parole prononcée dans le désert par le peuple (Ex 16) devant ce « pain descendu du ciel ». Cela donnera le mot français « manne ». Oui, Jésus est aussi annoncé ici comme la Manne, le pain descendu du ciel qui nous nourrit quotidiennement !



Jésus au jardin des Oliviers

Anonyme

Vitrail de la Passion, XVIe siècle

Église Saint-Pitère, Le Tréhou (France)


Évangile selon saint Luc (Lc 22, 39-46)

Jésus sortit pour se rendre, comme d'habitude, au mont des Oliviers, et ses disciples le suivirent. Arrivé là, il leur dit : « Priez, pour ne pas entrer en tentation. » Puis il s'écarta à la distance d'un jet de pierre environ. Se mettant à genoux, il priait : « Père, si tu veux, éloigne de moi cette coupe ; cependant, que ce ne soit pas ma volonté qui se fasse, mais la tienne. » Alors, du ciel, lui apparut un ange qui le réconfortait. Dans l'angoisse, Jésus priait avec plus d'insistance ; et sa sueur devint comme des gouttes de sang qui tombaient jusqu'à terre. Après cette prière, Jésus se leva et rejoignit ses disciples qu'il trouva endormis à force de tristesse. Il leur dit : « Pourquoi dormez-vous ? Levez-vous et priez, pour ne pas entrer en tentation. »


L’église Saint-Pitère de Le Tréhou fait partie des enclos paroissiaux renommés de Bretagne. À l’intérieur, on peut découvrir une merveilleuse baie de vitraux du XVIème siècle représentant des épisodes de la Passion du Christ. Un des panneaux évoque la prière angoissée de Jésus au Jardin des Oliviers.


Il est à genoux, dans une attitude de supplication, tendant les mains comme une offrande au Père qui lui offre, par l’entremise de l’Ange, le calice de la souffrance à venir. À ses pieds, Jean et Pierre reposent, dans un sommeil profond. Jacques n’y est pas figuré. Le jardin est évoqué tant par les plantes au sol, que par les branches d’olivier derrière le Christ, mais aussi par la haie dans le fond, d’où l’on voit émerger les pics des soldats qui s’avancent.


Jésus est tourné vers son Père, il sait qu’il doit se livrer à ses bourreaux qui s’approchent pour sauver le genre humain. Telle est la mission que le Père lui a confiée, mission paternelle dont il avait déjà conscience devant les docteurs de la Loi, au Temple.


Cependant, hormis une représentation très classique de la scène, se vitrail nous ouvre des perspectives symboliques intéressantes. L’attitude de Pierre et Jean endormis paraît tellement proche d’une scène de la Nativité. Une naissance ?


Comme si Jean était à l’image de Marie, à la fois dans la disposition de la jeune fille qui donne son Fils aux hommes à Noël, que celle de la Vierge affligée qui reçoit dans ses bras, au pied de la Croix, Jésus mort. Son manteau bleu, signe de son humanité, se retrouve sur le vêtement du Christ. Et au-dessus de sa tête, on distingue cette arche grise qui pourrait signifier la porte ouverte du Jardin, porte par laquelle passera Marie-Madeleine à la Résurrection, porte qui révèle aussi sa virginité, elle l’Hortus Conclusus.


De même, l’attitude de Pierre, si proche de la représentation habituelle de saint Joseph. Est-il ce Joseph qui songe, l’Ange lui annonçant qu’il doit accueillir ce Fils qui troublera tant sa vie et celle de Marie ? Il est couvert d’un manteau d’or, comme l’Ange qui le domine, et d’une tunique rouge, comme Jésus, signe de sa Passion. Ou alors, serait-ce le manteau que va revêtir d’Église, par Pierre, comme image sur terre de présence du divin ? Et serait-ce la tunique rouge annonciatrice du martyre de Pierre ?


Le vitrail semble donc nous indiquer que la Passion de Jésus, son angoisse devant la mort qui s’approche, était déjà annoncée à la Nativité. Marie, surprise devant l’humanité de ce petit enfant, comme Jean ici, méditait tout cela en son cœur. Plus tard, Jésus, perdu par ses parents, sera retrouvé au Temple, et leur signifiait qu’il se devait aux affaires de son Père. Là encore, comme les deux disciples, Marie et Joseph méditèrent cette parole mystérieuse révélant sa divinité. Puis, à la Cène, Jésus offrait aux hommes le calice de son Sang, ce même calice qu’il reçut de son Père. Son humanité et sa divinité s’offraient d’un même élan pour le salut des hommes. Et cette Passion s’ouvrait sur une espérance, celle d’une porte ouverte, celle d’un Jardin - celui que l’on croyait définitivement clos depuis la faute d’Adam et Eve - d’une porte qui s’ouvrait sur la Résurrection.


Jésus le savait. Il en avait volontairement revêtu l’habit, le bleu de son humanité, le doré de sa divinité et le rouge de sa Passion qui commençait. Jésus priait… C’est aussi dans la prière que Dieu nous révélera ce qu’il attend de nous, dans notre libre choix de l’adéquation à sa volonté. Marie, reçue chez Jean, nous y aidera. Pierre, figure de l’Église naissante, nous réconfortera. Levons-nous et prions pour ne pas entrer en tentation, celle de ne pas savoir que nous sommes aussi appelés à entrer dans le Jardin.


Le labyrinthe de la Cathédrale d’Amiens

Anonyme

XIIIe siècle

Cathédrale Notre-Dame, Amiens (France)


Épître aux Philippiens, 2, 1-11

S’il est vrai que, dans le Christ, on se réconforte les uns les autres, si l’on s’encourage avec amour, si l’on est en communion dans l’Esprit, si l’on a de la tendresse et de la compassion, alors, pour que ma joie soit complète, ayez les mêmes dispositions, le même amour, les mêmes sentiments ; recherchez l’unité. Ne soyez jamais intrigants ni vaniteux, mais ayez assez d’humilité pour estimer les autres supérieurs à vous-mêmes. Que chacun de vous ne soit pas préoccupé de ses propres intérêts ; pensez aussi à ceux des autres. Ayez en vous les dispositions qui sont dans le Christ Jésus : Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix. C’est pourquoi Dieu l’a exalté : il l’a doté du Nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse au ciel, sur terre et aux enfers, et que toute langue proclame : « Jésus Christ est Seigneur » à la gloire de Dieu le Père.


Dans la cathédrale d’Amiens, on peut découvrir le célèbre labyrinthe. Il fut réalisé en marbre sur le dallage devant le chœur, au XIIIe siècle, et restauré au XIXe. Commençant à l’entrée de la nef par un trait noir, il se continue jusqu’au centre, marqué par une pierre représentant une croix orientée vers les quatre points cardinaux, surmontés d’anges, et entourée d’un évêque et des trois architectes de la cathédrale. Sur le pourtour en cuivre de cette pierre centrale, datée de 1288, est inscrit un long texte racontant la fondation du lieu saint. L’autre curiosité de ce labyrinthe est qu’il s’inscrit dans un octogone.


Quelle est donc la raison de la présence de ces labyrinthes dans plusieurs de nos églises (Saint-Quentin, Chartres, Reims dont il servira de logo pour le panneau des Monuments Historiques, etc.) ? Beaucoup y verront un signe cabalistique ou ésotérique, une sorte de parcours initiatique dont les arcanes ne peuvent être révélés à tous, d’autres plus simplement (et certainement plus justement) un parcours spirituel à l’image du pèlerinage de l’homme sur cette terre. Un parcours que l’on faisait à genoux… afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse au ciel, sur terre et aux enfers…


Le temps du Carême n’est-il pas un pèlerinage avec Jésus ? Combien de fois ne nous appelle-t-il pas à nous mettre debout, à le suivre, à nous mettre en marche, à prendre résolument avec lui le chemin de Jérusalem (Lc 9, 51) ? Et lui-même qui n’avait pas d’endroit où reposer la tête (Mt 8, 20), a pris le chemin de l’humanité, puis des Enfers (Ph 2), avant de rejoindre son Père. Toute notre vie est un parcours, depuis le premier passage que nous avons fait dans les eaux du baptême. Symboliquement, en entrant dans une église, nous vivons cet exode, ce chemin, passant du baptistère vers le choeur, déambulant dans la nef et les allées obscures, comme sur le chemin de notre vie, une vie où Dieu se fait lumière et parfois ténèbres. Mais une vie où il marche à nos côtés. Une vie de pèlerin…


Au Moyen-âge, beaucoup n’avaient ni les moyens matériels, ni le temps pour partir sur les pas de Jésus vers la Terre Sainte. Mais l’Église avait compris que ce voyage physique pouvait aussi être celui de l’Esprit. En son sein, en son cœur (et devant son chœur), on pouvait pérégriner vers Jésus. La cathédrale d’Amiens nous l’indique discrètement, nous montrant que tout pèlerinage est un passage, un baptême. Prends ton bâton et viens avec moi (Mc 6, 7-13). Comme avec les disciples au jardin des Oliviers, levez-vous et allons (Mc 14, 42). Comme les disciples d’Emmaüs, cheminons ensemble pour que tu me découvres (Lc 24, 13). Et un baptême subtilement désigné par l’octogone, rappel du huitième jour de la résurrection et des huit côtés des baptistères.


Le chemin est long et tortueux. C’est un vrai labyrinthe… comme l’est souvent notre vie, comme le sont particulièrement nos pensées, comme l’est parfois notre cœur. Le tout est de ne pas s’arrêter, de ne pas s’asseoir, mais de se mettre en route, de cheminer. Tu apprendras plus à me connaître dans le temps du chemin qu’à vouloir rejoindre trop vite le but.


Et si l’on est attentif, on découvre que ce chemin nous mène à un nouveau baptême, orienté vers l’autel, à la pierre fondamentale, celle de la naissance, de la mort et de la résurrection du Christ. Appelés à faire le même chemin. Un chemin pour renaître à nous-même, comme Jésus l’a dit à Nicodème (Jn 3, 3). Ou le laisser naître véritablement en nous… En effet, il y a une première chose curieuse. En suivant la ligne noire, on parvient au centre du labyrinthe, au coeur, à la pierre fondamentale (Is 28, 16 - Za 4, 7 - Mt 21, 42 - Eph 2, 20). Le temps du Carême comme quarante jours offerts pour repartir du cœur de notre foi, du cœur du Christ, du c(h)œur de l’Église ? Tout part de l’autel, de l’eucharistie, source et sommet de notre foi (Vatican II, LG 11). Puis, nous sommes invités à partir en pèlerinage au cœur du monde pour annoncer la Bonne Nouvelle.


En fait, le Carême est bien un double parcours à faire avec Jésus, une double naissance. De l’extérieur vers le chœur, vers l’autel, en passant par l’intérieur de nous-même pour y trouver le Christ au tréfonds, la pierre fondement de notre foi. Et de l’autel, par lui, avec lui et en lui, jusqu’à nos frères. Un parcours compliqué, semé d’embûches, mais où Jésus marche avec nous, il s’est même fait pour nous chemin, vérité et vie (Jn 14, 6). Un parcours où on le découvre, où il vient naître en nous. Et ce labyrinthe, même s’il est long, a l’avantage de ne dresser aucun piège. Tous les chemins y mènent à Jésus ! Un parcours labyrinthique fait par tant et tant de nos frères qui voulaient, comme nous, rejoindre la vraie Jérusalem, la cité du ciel. Tout pèlerinage est un baptême où l’on est appelé à renaître. Tout Carême est un moment privilégié pour que nos genoux fléchissent sur terre devant le Christ, un parcours de quarante jours pour nous laisser renaître, comme Nicodème. Bonne route !



Homélie du bienheureux Guerric d'Igny (+ 1157), Sermons sur les Rameaux, 3,25, SC 202, 188-192 198-200

Bien des gens ont été stupéfaits du triomphe glorieux remporté par Jésus lorsqu'il fit son entrée à Jérusalem, alors que peu après il montra dans sa passion un visage sans gloire et humilié. <>


Si l'on considère en même temps la procession d'aujourd'hui et la passion, on voit Jésus, d'un côté sublime et glorieux, de l'autre humble et misérable. Car dans la procession il reçoit des honneurs royaux, et dans la passion on le voit châtié comme un bandit. Ici, la gloire et l'honneur l'environnent, là il n'a ni apparence ni beauté (cf. Is 53,2). Ici, c'est la joie des hommes et la fierté du peuple ; là, c'est la honte des hommes et le mépris du peuple (cf. Ps 21,7). Ici, on l’acclame : Hosanna au fils de David. Béni soit le roi d'Israël qui vient (cf. Mc 11,10). Là, on hurle qu'il mérite la mort et on se moque de lui parce qu'il s'est fait roi d'Israël. Ici, on accourt vers lui avec des palmes ; là, ils le soufflettent au visage avec leurs paumes, et l'on frappe sa tête à coups de roseau. Ici, on le comble d’éloges ; là, il est rassasié d'injures. Ici, on se dispute pour joncher sa route avec le vêtement des autres ; là, on le dépouille de ses propres vêtements. Ici, on le reçoit dans Jérusalem comme le roi juste et le Sauveur ; là, il est chassé de Jérusalem comme un criminel et un imposteur. Ici, il est monté sur un âne, assailli d’hommages ; là, il est pendu au bois de la croix, déchiré par les fouets, transpercé de plaies et abandonné par les siens. <>


Si nous voulons, mes frères, suivre notre chef sans trébucher à travers la prospérité comme à travers l'adversité, contemplons-le mis en honneur dans cette procession, soumis aux outrages et aux souffrances dans sa passion, mais gardant une âme immuable dans un tel bouleversement. <>


Seigneur Jésus, c'est toi, joie et salut de tous, que tous bénissent de leurs voeux, qu'ils te voient monté sur l'âne ou suspendu à la croix. Que tous puissent te voir régnant sur ton trône royal et te louent pour les siècles des siècles. A toi louange et honneur pour tous les siècles des siècles.


Homélie de saint Augustin (+ 430), Homélies sur l'évangile de saint Jean, 51, 2-4; CCL 36, 440-441.

La grande foule qui était venue pour la fête, apprenant que Jésus venait à Jérusalem, prit des branches de palmier et sortit à sa rencontre. Les gens criaient : Hosanna! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni soit le roi d’Israël ! (Jn 12,12-13) Les rameaux de palmier sont des louanges symbolisant la victoire que le Seigneur allait remporter sur la mort en mourant lui-même, et le triomphe qu'il allait obtenir sur le démon, prince de la mort, par le trophée de la croix. <>


Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, le roi d’Israël ! Cette acclamation doit se comprendre plutôt en ce sens : "Béni soit celui qui vient au nom du Père", bien qu'on puisse aussi comprendre: celui qui vient en son propre nom, parce que lui-même aussi est Seigneur.


Mais ses paroles nous orientent plutôt vers le sens que nous proposons, car il a dit : Moi, je suis venu au nom du Père, et vous ne me recevez pas; si un autre vient en son propre nom, celui-là, vous le recevrez (Jn 5,43) ! En effet, le Christ est le maître de l'humilité, lui qui s'est abaissé en devenant obéissant jusqu'à mourir, et à mourir sur une croix (Ph 2,8). Car il ne perd pas sa divinité lorsqu'il nous enseigne l'humilité. Par celle-là il est égal au Père, par celle-ci il est semblable à nous. Par le fait qu'il est égal au Père, il nous a créés pour que nous existions; par le fait qu'il nous est semblable, il nous a rachetés, pour que nous ne périssions pas.


La foule lui adressait donc ces louanges : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, le roi d’Israël ! Quel supplice l'esprit envieux des chefs des Juifs pouvait-il supporter, quand toute cette foule acclamait le Christ comme son roi ! Mais qu'est-ce que cela pouvait représenter pour le Seigneur, d'être le roi d’Israël ? Quelle grandeur y avait-il pour le roi des siècles (1 Tm 1,17) à devenir un roi pour les hommes ? Car le Christ n'était pas roi d'Israël pour exiger l'impôt, pour armer des troupes ni pour terrasser visiblement des ennemis. Il est roi d'Israël pour gouverner des âmes, veiller à leurs intérêts éternels et conduire au Royaume des cieux ceux qui ont mis en lui leur foi, leur espérance, leur amour. Donc, si le Fils égal au Père, le Verbe par qui tout a été fait (Jn 1,3), a voulu être roi d'Israël, ce fut de sa part compassion et non promotion, une marque de miséricorde, non un accroissement de pouvoir. Car celui qui fut appelé sur terre le roi des Juifs, est dans les cieux le Seigneur des anges. <>


Jésus, trouvant un « petit âne, monta dessus. Il accomplissait ainsi l’Écriture : N'aie pas peur, fille de Sion. Voici ton roi qui vient, monté sur le petit d'un ânesse (Jn 12,15 ; Za 9,9). Cette fille de Sion, à laquelle sont adressées ces paroles inspirées, faisait partie de ces brebis qui écoutaient la voix du pasteur ; elles étaient dans cette foule qui louait avec tant d'enthousiasme la venue du Seigneur, qui l'escortait par un tel cortège. C'est à elle qu'il a été dit : N'aie pas peur (Jn 12,15). Reconnais celui que tu acclames et ne tremble pas devant sa passion, car ce sang qui est répandu, c'est lui qui effacera ton péché et te rendra la vie.


Prière

Dieu éternel et tout-puissant, pour montrer au genre humain quel abaissement il doit imiter, tu as voulu que notre Sauveur, dans un corps semblable au nôtre, subisse la mort de la croix : accorde-nous cette grâce de retenir les enseignements de sa passion et d'avoir part à sa résurrection. Lui qui règne.

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