top of page

IIIe dimanche de Carême (C)

Marie, la Theotokos -



La Vierge et l'Enfant, entourés de Justinien et Constantin,

Anonyme,

Mosaïque de l’entrée sud-ouest, 944,

Basilique Sainte-Sophie, Constantinople (Turquie)


Lecture du livre de l’Exode (Ex 3, 1-8a.10.13-15

En ces jours-là, Moïse était berger du troupeau de son beau-père Jéthro, prêtre de Madiane. Il mena le troupeau au-delà du désert et parvint à la montagne de Dieu, à l’Horeb. L’ange du Seigneur lui apparut dans la flamme d’un buisson en feu. Moïse regarda : le buisson brûlait sans se consumer. Moïse se dit alors : « Je vais faire un détour pour voir cette chose extraordinaire : pourquoi le buisson ne se consume-t-il pas ? » Le Seigneur vit qu’il avait fait un détour pour voir, et Dieu l’appela du milieu du buisson : « Moïse ! Moïse ! » Il dit : « Me voici ! » Dieu dit alors : « N’approche pas d’ici ! Retire les sandales de tes pieds, car le lieu où tu te tiens est une terre sainte ! » Et il déclara : « Je suis le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob. » Moïse se voila le visage car il craignait de porter son regard sur Dieu. Le Seigneur dit : « J’ai vu, oui, j’ai vu la misère de mon peuple qui est en Égypte, et j’ai entendu ses cris sous les coups des surveillants. Oui, je connais ses souffrances. Je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens et le faire monter de ce pays vers un beau et vaste pays, vers un pays ruisselant de lait et de miel. Maintenant donc, va ! Je t’envoie chez Pharaon : tu feras sortir d’Égypte mon peuple, les fils d’Israël. » Moïse répondit à Dieu : « J’irai donc trouver les fils d’Israël, et je leur dirai : “Le Dieu de vos pères m’a envoyé vers vous.” Ils vont me demander quel est son nom ; que leur répondrai-je ? » Dieu dit à Moïse : « Je suis qui je suis. Tu parleras ainsi aux fils d’Israël : “Celui qui m’a envoyé vers vous, c’est : Je-suis.” » Dieu dit encore à Moïse : « Tu parleras ainsi aux fils d’Israël : “Celui qui m’a envoyé vers vous, c’est Le Seigneur, le Dieu de vos pères, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob.” C’est là mon nom pour toujours, c’est par lui que vous ferez mémoire de moi, d’âge en d’âge. »


Psaume 102

Bénis le Seigneur, ô mon âme, bénis son nom très saint, tout mon être ! Bénis le Seigneur, ô mon âme, n’oublie aucun de ses bienfaits !


Car il pardonne toutes tes offenses et te guérit de toute maladie ; il réclame ta vie à la tombe et te couronne d’amour et de tendresse.


Le Seigneur fait œuvre de justice, il défend le droit des opprimés. Il révèle ses desseins à Moïse, aux enfants d’Israël ses hauts faits.


Le Seigneur est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour. Comme le ciel domine la terre, fort est son amour pour qui le craint.


Lecture de la première lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens (1 Co 10, 1-6.10-12)

Frères, je ne voudrais pas vous laisser ignorer que, lors de la sortie d’Égypte, nos pères étaient tous sous la protection de la nuée, et que tous ont passé à travers la mer. Tous, ils ont été unis à Moïse par un baptême dans la nuée et dans la mer ; tous, ils ont mangé la même nourriture spirituelle ; tous, ils ont bu la même boisson spirituelle ; car ils buvaient à un rocher spirituel qui les suivait, et ce rocher, c’était le Christ. Cependant, la plupart n’ont pas su plaire à Dieu : leurs ossements, en effet, jonchèrent le désert. Ces événements devaient nous servir d’exemple, pour nous empêcher de désirer ce qui est mal comme l’ont fait ces gens-là. Cessez de récriminer comme l’ont fait certains d’entre eux : ils ont été exterminés. Ce qui leur est arrivé devait servir d’exemple, et l’Écriture l’a raconté pour nous avertir, nous qui nous trouvons à la fin des temps. Ainsi donc, celui qui se croit solide, qu’il fasse attention à ne pas tomber.


Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 13, 1-9)

Un jour, des gens rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer, mêlant leur sang à celui des sacrifices qu’ils offraient. Jésus leur répondit : « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort ? Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu’elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ? Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. » Jésus disait encore cette parabole : « Quelqu’un avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n’en trouva pas. Il dit alors à son vigneron : “Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le. À quoi bon le laisser épuiser le sol ?” Mais le vigneron lui répondit : “Maître, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas.” »


La mosaïque

Les mosaïques du tympan de l'entrée sud-ouest datent de 944. Elles furent redécouvertes lors des restaurations de Fossati, en 1849. La Vierge Marie est assise sur un trône sans dossier décoré de pierres précieuses. L'Enfant Jésus est assis sur ses genoux, donnant sa bénédiction et tenant un rouleau dans sa main gauche. À droite se tient l'empereur Constantin, en costume de cérémonie, présentant à Marie un modèle de la ville. L'inscription à son côté dit : « KΩNCTANTINOC O EN AΓIOIC MEΓAC BACIΛEYC », « Constantin, le grand basileus (roi) parmi les saints ». À gauche se tient l'empereur Justinien, offrant Sainte-Sophie avec, au-dessus de lui, l'inscription : « IOYCTINIANOC O AOIΔIMOC BACIΛEYC », « Justinien, le basileus (roi) digne d'être chanté ». Les médaillons, des deux côtés de la tête de la Vierge, portent les monogrammes « MP » et « ΘY », abréviation de « MHTHP ΘEOY », « Mère de Dieu ».


Quelques remarques

En contemplant les représentations byzantines de la Vierge Marie, on peut être surpris d’un certain nombre de canons iconographiques. J’en souligne quelques-uns :

  • Sur le voile et le manteau de la Vierge, on peut voir trois étoiles. Elles rappellent la triple virginité mariale : avant, pendant et après la Nativité du Christ.

  • Les « types » de représentation de la Mère de Dieu sont multiples mais peuvent se résumer ainsi pour les plus courantes :

    • La Vierge Playtera : debout, bras tendus, la Vierge porte un médaillon représentant le Christ.

    • La Vierge Hodigitria : sur un trône, elle porte sur son bras gauche l'enfant bénissant.

    • La Vierge Eleousa : la Vierge a un regard lointain, contemplatif, tandis que l'enfant appuie sa joue contre celle de sa mère.

    • La Vierge protectrice : la Vierge étend son voile ou son manteau sur une cité ou sur des hommes.

    • La Panakhranta (dite aussi miséricordieuse). Ici la Mère de Dieu apparaît sur un trône avec l'enfant Jésus sur ses genoux. Ce trône symbolise la puissance royale de Marie, Mère de Dieu.

    • La Deisis représentant Marie, Mère de Dieu sans son enfant, mais parfois entourée d'autres personnages saints. Souvent le Christ et Saint-Jean le Baptiste. Celles des deisis qui représentent Marie sont appelées Agiosoritissas.

    • La Galaktotrophousa représente la Vierge Marie allaitant.

    • Comme sur la mosaïque, la Vierge est entourée de deux monogrammes « MP » et « ΘY », abréviation de « MHTHP ΘEOY », « Mère de Dieu »

Méditation

Pour commencer, un peu d’histoire théologique…


Au IVe siècle, les deux conciles de Nicée et de Constantinople avaient solennellement proclamé et la divinité et l’humanité du Christ en une seule personne. Les ariens qui ne reconnaissaient pas la première, ni les gnostiques la seconde, étaient désormais officiellement des hérétiques et ne faisaient plus partie de l’Eglise… Les débats n’en avaient pas moins continué à se poursuivre sur la distinction entre les deux natures, humaine et divine, de la personne du Christ.


Un théologien de l’Ecole d’Antioche, Nestorius, devenu évêque, poussera si loin cette distinction qu’il ira jusqu’à conclure que le Verbe de Dieu n’avait pas pu se faire vraiment chair et, par voie de conséquence, que si Marie avait bien enfanté l’homme Jésus, elle ne pouvait pas pour autant être dite la mère de Dieu. Il est facile d’imaginer l’émotion qui s’était alors emparée de beaucoup de chrétiens dont la foi était étroitement liée à leur attachement à Marie, mère de Jésus-Christ, lui-même fils de Dieu.


En condamnant Nestorius, le concile d’Ephèse, en 431, réaffirmera que Jésus-Christ était bien une seule personne en deux natures et, sur l’insistance de l’évêque Cyrille d’Alexandrie, en accord avec l’évêque de Rome, il proclamera solennellement que Marie peut et doit bien être dite la Mère de Dieu… la Theotokos.

« On sait qu’une leçon essentielle de ce concile est de lier de façon infrangible la Christologie et la Mariologie : une juste compréhension du Christ est liée à une juste compréhension du rôle de Marie, Mère de Dieu… Une expression prodigieuse et mystérieuse, chargée de conséquences pour la vie de l’Eglise… sans laquelle on ne peut s’imaginer le foisonnement des icônes d’Orient ni des images de l’Occident chrétien. N’est-ce pas l’inscription de ce titre sur chaque icône qui affirme la dimension transcendantale de cette femme représentée avec son enfant ? … Et dans ce mystère, la joie de toute mère reçoit une nouvelle noblesse… » Les icônes byzantines de la Mère de Dieu. (DDB. Bellarmin. 1992. E.S. p. 269-271)

Pas si simple…

On entend parfois dire que les divergences entre catholiques et orthodoxes sont moins importantes que celles entre catholiques et protestants. C’est à la fois vrai… et faux ! En effet, beaucoup réduisent le fossé entre l’occident et l’orient à deux questions : la primauté pontificale et le filioque (la controverse sur la procession de l’Esprit du Père et du Fils : Filioque en latin). Mais, à mon avis, plus qu’une question de pouvoir et de primauté de Pierre, ou d’une question théologique sur l’Esprit-Saint, c’est d’abord une question de conception spirituelle. Je la résumerai en quelques concepts (comme tout résumé, il est toujours insatisfaisant et réducteur).


1- Pour reprendre les termes de dimanche dernier, l’Orient est catéchétique, l’Occident est didactique. Ou pour le dire autrement : l’Orient va partir de la foi pour établir ensuite des dogmes rationnels, alors que l’Occident commencera par établir avec précision sa foi sous forme de dogmes avant de les vivre dans la foi. Pourtant, comme le dit l’adage : lex orandi, lex credendi, lex vivendi (« la loi de ce qui est prié [est] ce qui est cru et ce qui est vécu »). En aparté, j’ai peur que l’époque moderne ait modifié l’ordre en lex vivendi, lex credendi, lex orandi, mettant ainsi comme critère de discernement ce que l’on vit pour définir ce que l’on doit croire (je parle ici des nombreuses questions morales auxquelles notre société est confrontée). Depuis quelques siècles, dans l’Église catholique, nous avons construit de minutieuses synthèses dogmatiques pour, non pas nous dire ce que l’on doit croire (et que l’on devrait d’abord prier), mais plutôt pour y dénoncer les innombrables erreurs théologiques possibles. C’est très didactique mais peu catéchétique. Je crains souvent qu’un théologien, à la lecture de mes méditations, cherche d’abord ce qui ne serait pas juste théologiquement (et les erreurs ou approximations ne doivent pas manquer) plutôt que de se demander si cela édifie (dans le sens de construire) l’âme des lecteurs et les rapproche du Seigneur. L’Orient dessine un pont vers Dieu, l’Occident en désigne les garde-fous ! Une nouvelle fois le trait est forcé pour marquer les contrastes, mais vous commencez à me connaître…


2- Encore deux termes de dimanche dernier : poïétique mystérieuse ou méticulosité cartésienne. Notre Occident est méticuleux, précis. Nous aimons les définitions bien structurées où chaque mot est pesé, évalué. Le mystère nous déplaît et demande toujours à être élucidé. L’obscurité est synonyme de ténèbres effrayantes. L’Orient aime la poésie, le sfumato, l’obscurité, et n’a qu’une peur : enfermer l’indicible dans des mots ! Il va définir des dogmes quand il ne peut pas faire autrement, afin d’éviter les hérésies trop flagrantes. Mais pour le reste, il préfère laisser flotter un parfum de mystère qui ne l’effraie pas ; au contraire, il lui semble être le climat nécessaire pour que l’Esprit s’exprime. Il n’aime pas non plus les ténèbres, mais ne dédaigne pas l’obscurité qui n’est que l’aveuglement de nos pauvres yeux devant l’éblouissant mystère divin. Et même si le rite liturgique est bien défini depuis des siècles, il lui laisse l’apparence du mystère divin qui se déroule derrière un voile. Car il sait que nos sens ne peuvent encore saisir le divin, et que sur cette terre, c’est le mystère divin qui doit nous saisir. L’Orient ne cherche pas à rejoindre Dieu à la force de sa pensée (comme nos cathédrales gothiques qui paraissent parfois des Tours de Babel défiant toute contrainte physique pour rejoindre le ciel), mais laisse Dieu descendre jusqu’à nous, jusqu’au tréfonds de nos ténèbres, jusqu’au plus profond de notre être, de notre incarnation. À tel point que l’Orient développera une méthode théologique incompatible avec nos esprits cartésiens : l’apophatisme. Je vous en donne la définition (Doctus cum libro) :


La théologie apophatique (du substantif grec ἀπόφασις, apophasis, issu du verbe ἀπόφημι – apophēmi, « nier ») est une approche fondée sur la négation. En dérive la théologie négative, approche qui insiste plus sur ce que Dieu n'est pas que sur ce que Dieu est. Elle se situe à l'opposé de la théologie cataphatique, ou positive.

La théologie négative peut être appréhendée de deux façons : par négation (démarche apophatique) ou par abstraction (méthode aphairétique, du grec aphairesis, « abstraction »).


Ainsi le chantait saint Grégoire de Naziance :

O Toi, l'au-delà de tout, n'est-ce pas là tout ce qu'on peut chanter de toi ? Seul, tu es indicible, car tout ce qui se dit est sorti de toi. Le désir universel, l'universel gémissement tend vers toi. De tous les êtres, tu es la fin, tu es tout être et tu n'en es aucun. Quel esprit céleste pourra pénétrer les nuées qui couvrent le ciel même ? Quelle hymne te dira, quel langage ? Aucun mot ne t'exprime. Seul, tu es inconnaissable, car tout ce qui se pense est sorti de toi. Tout ce qui est te prie, et vers toi ton univers fait monter Tu n'es pas un seul être, tu n'es pas leur ensemble. O Toi, l'au-delà de tout, n'est-ce pas tout ce que l'on peut chanter de toi ? À quoi l'esprit s'attachera-t-il ? Tu dépasses toute intelligence. Tous les êtres, ceux qui parlent Tous les êtres, ceux qui pensent tout être qui pense ton univers une hymne de silence. Tu as tous les noms, et comment te nommerai-je, toi le seul qu'on ne peut nommer ? et ceux qui sont muets te proclament, et ceux qui n'ont point de pensée te rendent hommage. Tout ce qui demeure, de meure par toi, par toi, subsiste l'universel mouvement.

J’ai souvent eu l’impression que cette théologie négative laissait place à la poïétique : en acceptant de ne rien dire sur l’invisible, elle le rendait mystiquement présent, elle le laissait venir et advenir dans l’âme. Alors qu’une théologie trop structurée, trop précise, trop méticuleuse, pouvait finir, à force de dissection, par tuer l’âme et l’esprit, par désincarner notre foi.


3- Et pour finir, deux derniers mots : sentiment ou émotion. Psychologiquement, les deux mots n’ont pas le même sens :


L’émotion est un état affectif intense qui se manifeste par une forte perturbation mentale et ou physique (cris, pleurs, éclats de rire, tension…) qui nous empêche de réagir de façon raisonnable et appropriée à l’événement qui l’a provoquée. L’émotion est quelque chose de tellement fort qu’elle a tendance à nous submerger et nous faire perdre nos moyens. Elle est passagère.

Le sentiment est la prise de conscience d’un état émotionnel. Comme l’émotion, il s’agit d’un état affectif, mais contrairement à elle il se construit sur des représentations mentales, s’installe durablement chez l’individu et son ressenti est moins intense. Autre différence, le sentiment est généralement dirigé vers un élément précis (une situation, une personne…), tandis que l’émotion peut ne pas avoir d’objet bien défini.


Dernièrement, j’ai entendu des catholiques me parler de la Vierge Marie comme notre « maman du ciel ». J’avoue que je ne rentre absolument pas dans cette terminologie que je trouve mielleuse et surtout trop émotionnelle. Qui plus est, le danger est de la séparer du Christ, son Fils, au risque de la transformer en « déesse ». Il y a quelques années, l’Église catholique a même tenté de faire de Marie une « co-rédemptrice » avec le Christ. La Commission Théologique Internationale est revenue sur les propos du Pape (c’était Jean-Paul II, comme quoi on peut être Pape, saint et faire des erreurs) déclarant, par le voix du Cardinal Joseph Ratzinger :

« Le concept de corédemptrice s'écarte aussi bien de l'Écriture que des écrits patristiques. [...] Tout vient [du Christ], comme le soulignent les épîtres aux Éphésiens et aux Colossiens. Marie aussi est tout ce qu'elle est par lui. Le terme de corédemptrice obscurcirait cette donnée originelle. Une bonne intention s'exprime dans un mauvais vocable. Dans le domaine de la foi, la continuité avec la langue de l'Écriture et des Pères est essentielle. La langue n'est pas manipulable à volonté. »

La Vierge Marie ne doit pas être abordée par le biais de l’émotion, mais plutôt par celui du sentiment. Elle n’est pas notre maman du ciel (une seule sur terre me suffit), mais elle est la Mère de Dieu, la Theotokos, et en cela elle éveille en moi le sentiment de la sainteté.


Immaculée Conception et sainteté

L’Église catholique a défini le dogme de l’Immaculée Conception en 1854 (quatre ans avant les apparitions de Lourdes) en ces termes :

« Nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine, qui tient que la bienheureuse Vierge Marie a été, au premier instant de sa conception par une grâce et une faveur singulière du Dieu tout-puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel, est une doctrine révélée de Dieu, et qu’ainsi elle doit être crue fermement, et constamment par tous les fidèles. »

Ainsi, dès sa conception par Anne et Joachim, Marie ne fut pas « contaminée » par le péché originel que nos parents se transmettent depuis les origines, et ce par une grâce spéciale de Dieu, afin de préparer la venue en son sein du Christ, et ne pas non plus lui transmettre ce « germe du péché » qui rendrait toute rédemption impossible.


Les orthodoxes refusent la conception issue de ce dogme. Car, il y a, à leurs yeux, une autre voie possible. Ils estiment que ce dogme sépare Marie du genre humain, la met à part, et en ferait une femme « pas comme nous ». Et alors, pourquoi Dieu ne l’aurais-il pas fait pour Adam ? Ainsi, cette grâce faite à Marie rendrait la chute des origines incompréhensible. Paul Evdokimov, grand théologien russe qui enseigna à Paris, écrit :

« La grâce ne viole et ne force point l’ordre de la nature, mais la parachève. Jésus peut prendre la chair humaine parce que l’humanité en Marie la lui donne, et ce n’est donc pas à la rédemption que la Vierge participe, mais à l’incarnation ». (Paul Evdokimov, L’orthodoxie, page 150, Paris, 1979)

Pour l’orthodoxie, Marie a bénéficié des grâces de ses ancêtres qui, peu à peu, ont avancé en sainteté. Et en Marie se fait une synergie entre cette sainteté accumulée et sa parfaite volonté à servir Dieu, à tel point que la pureté de son réceptacle (gratia plena, pleine de grâce comme dira l’ange) va désarmer le mal. Le péché originel en Marie reste effectif mais devient inopérant. Ainsi, elle devient non simplement une « femme parmi les femmes », mais l’avènement de la Femme restituée dans sa virginité maternelle. Elle devient l’Ève-Vie, protectrice maternelle de toute vie, et couvre ainsi l’univers et tout homme. En enfantant le Christ, en tant qu’Ève universelle, elle l’enfante pour tous, et donc l’enfante aussi dans toute âme. Et c’est aussi en cela qu’elle est la Theotokos, la Mère de Dieu, car elle enfante en chacun de nous le Christ. Et encore plus, elle en devient donc la Mère de l’Église, de nous tous.


Il me semble que cette conception est moins mièvre que « notre maman du ciel » qui n’apporte rien et ne nourrit pas ma foi, seulement mes émotions…, alors que c’est mon sentiment d’amour pour cette Mère de Dieu qui doit croître en moi. C’était l’explication de ma troisième remarque préliminaire introductive (émotion ou sentiment).


Assomption ou Dormition ?

L’Église catholique, en 1950, a proclamé un autre dogme, l’Assomption. Le pape Pie XII, déclarait ainsi :

« Par l'autorité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux apôtres Pierre et Paul, et par Notre propre autorité, Nous prononçons, déclarons, et définissons comme un dogme divinement révélé que l'Immaculée Mère de Dieu, la Vierge Marie, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire céleste »

Notez la curiosité théologique… Si Marie avait échappé au péché originel, elle ne devait pas en subir les conséquences : la mort. Le Pape contourne le problème avec élégance : après avoir achevé le cours de sa vie terrestre ! Et l’on ne parle pas non plus de résurrection pour la Vierge, mais d’élévation.


L’orthodoxie parlera, elle, de dormition. Marie a vécu saintement, ne laissant pas place à l’action du péché en elle, et est donc morte, a été ensevelie, puis est ressuscitée et montée au ciel. C’est la logique de la différence de conception de l’opérance du péché originel dans les deux Églises.


Le Fils de Dieu est descendu des cieux et se fit homme par la Vierge, pour que les hommes puissent s’élever vers la déification par la grâce du Saint Esprit. « Posséder par la grâce ce que Dieu a par nature » – c’est la vocation suprême des êtres créés, la fin dernière à laquelle les fils de l’Église aspirent ici-bas, dans le devenir historique de l’Église. Ce devenir est déjà consommé dans la Personne divine du Christ, Chef de l’Église ressuscité et monté au ciel. Si la Mère de Dieu a pu vraiment réaliser dans sa personne humaine et créée la sainteté qui correspondait à son rôle unique, elle ne pouvait pas ne pas atteindre ici-bas, par la grâce, tout ce que son Fils possédait en vertu de sa nature divine.


Et c’est là où j’en reviens à ma deuxième remarque préliminaire (poïétique mystérieuse ou méticulosité cartésienne). L’Église catholique ce sent le besoin de définir les événements et la foi de façon dogmatique, au risque de quelques difficultés (au terme de sa vie terrestre). L’orient préfère laisser le mystère agir, ne rien dire plutôt que de mal dire, voire de trop en dire…


Ainsi le disait saint Basile (Traité du Saint-Esprit, XXVII) :

« Il s’agit d’un enseignement impubliable et ineffable, lequel fut conservé par nos pères dans un silence inaccessible à toute curiosité et indiscrétion, car ils ont été sainement instruits à protéger la sainteté du mystère par le silence. Il ne serait point convenable, en effet, de publier par écrit l’enseignement sur les objets qui ne doivent pas être présentés aux regards de ceux qui n’ont pas été initiés aux mystères. En outre, la raison d’une tradition non écrite est celle-ci : en examinant plusieurs fois de suite le contenu de ces enseignements, plusieurs risqueraient de perdre la vénération à force d’habitude. Car une chose est l’enseignement, une autre chose, la prédication. Les enseignements sont gardés en silence, les prédications sont manifestées. Une certaine obscurité dans les expressions, dont les Écritures font parfois usage, est aussi une façon de garder le silence, afin de rendre difficilement intelligible le sens des enseignements, pour l’utilité plus grande de ceux qui lisent. »

Je n’en dis pas plus, hormis de vous inviter à lire, ou à écouter (il suffit de taper sur Youtube : Acathiste à la Mère de Dieu) l’hymne orthodoxe à la Vierge.


CÉLÉBRATION DE L'HYMNE "AKATHISTOS" DANS LA BASILIQUE PATRIARCALE SAINTE-MARIE MAJEURE - HOMÉLIE DU PAPE JEAN PAUL II - Vendredi 8 décembre 2000


1. Marie "est l'icône de l'Eglise, symbole et anticipation de l'humanité transfigurée par la grâce, modèle et espérance certaine pour toux ceux qui portent leurs pas vers la Jérusalem céleste" (Lett. apost. Orientale lumen, n. 6).


Très chers frères et soeurs ! Nous voici rassemblés dans la basilique que le peuple romain, au lendemain du Concile d'Ephèse, a consacrée avec une fervente piété à la Très Sainte Vierge Marie. Ce soir, la tradition liturgique byzantine célèbre les premiers Vêpres de la Conception de sainte Anne, alors que la liturgie latine rend grâce à l'Immaculée Conception de la Mère de Dieu.


J'exprime ma vive satisfaction pour la participation d'un groupe de frères et soeurs qui se trouvent ici ce soir avec nous, et qui représentent les Eglises orientales catholiques. J'adresse un salut cordial à tous les évêques de rite byzantin présents dans cette basilique avec leurs fidèles.


2. Ce soir, nous sommes tous envahis d'une joie intime : la joie de rendre grâce à Marie à travers l'hymne Akathistos, si cher à la tradition orientale. Il s'agit d'un cantique entièrement centré sur le Christ, contemplé à la lumière de la Vierge, sa Mère. Celui-ci nous invite 144 fois à renouveler à Marie le salut de l'Archange Gabriel : Ave Maria ! Nous avons reparcouru les étapes de son existence et rendu grâce pour les prodiges accomplis en Elle par le Tout-Puissant : de sa conception virginale, début et principe de la nouvelle création, à sa maternité divine, au partage de la mission de son Fils, en particulier lors des moments de sa mort et de sa résurrection. Mère du Seigneur ressuscité et Mère de l'Eglise, Marie nous précède et nous conduit à la connaissance authentique de Dieu et à la rencontre avec le Rédempteur. Elle nous indique la voie et nous montre son Fils. En la célébrant avec joie et avec gratitude, nous honorons la sainteté de Dieu, dont la miséricorde a fait des merveilles dans son humble servante. Nous la saluons sous le titre de "Pleine de grâce" et nous implorons son intercession pour tous les fils de l'Eglise qui, à travers cet Hymne Akathistos, célèbrent sa gloire. Puisse-t-elle nous guider pour contempler, lors du prochain Noël, le mystère de Dieu fait homme pour notre salut !


Acathiste à la Mère de Dieu


Un « acathiste » est une hymne que l'on écoute debout. L'Acathiste à la Mère de Dieu, le premier et le plus connu des acathistes, est typiquement célébré aux matines du samedi de la cinquième semaine du grand Carême. Chez les Grecs, les stances de l'acathiste sont distribuées sur les quatre premiers vendredis de Carême. L'acathiste doit son origine au siège de Constantinople en 626, lorsque le patriarche Serge, en l'absence de l'empereur Héraclius, organisa la défense de la cité et consacra la ville à la Mère De Dieu.


Un ange, parmi ceux qui se tiennent devant la Gloire du Seigneur, fut envoyé dire à la Mère de Dieu : " Réjouis-toi ! Il incline les cieux et descend, Celui qui vient demeurer en toi dans toute sa plénitude. Je le vois dans ton sein prendre chair à ma salutation ! " Avec allégresse, l'ange l'acclame :


Réjouis-toi en qui resplendit la joie du Salut Réjouis-toi en qui s’éteint la sombre malédiction Réjouis-toi en qui Adam est relevé de sa chute Réjouis-toi en qui Ève est libérée de ses larmes


Réjouis-toi Montagne dont la hauteur dépasse la pensée des hommes Réjouis-toi Abîme à la profondeur insondable même aux anges Réjouis-toi tu deviens le Trône du Roi Réjouis-toi tu portes en ton sein Celui qui porte tout


Réjouis-toi Étoile qui annonce le Lever du Soleil Réjouis-toi tu accueilles en ta chair ton enfant et ton Dieu Réjouis-toi tu es la première de la Création Nouvelle Réjouis-toi en toi nous adorons l’Artisan de l’univers


Réjouis-toi Épouse inépousée !


La Toute-Sainte répondit à l’ange Gabriel avec confiance : " Voilà une parole inattendue, qui paraît incompréhensible à mon âme, car tu m’annonces que je vais enfanter, moi qui suis vierge. "

Alléluia, alléluia, alléluia !


Pour comprendre ce mystère qui dépasse toute connaissance, la Vierge dit au Serviteur de Dieu : " Comment, dis-moi, me sera-t-il possible de donner naissance à un fils alors que je ne connais pas d’homme ? " Plein de respect, l’ange l’acclame :


Réjouis-toi tu nous ouvres au secret du Dessein de Dieu Réjouis-toi tu nous mènes à la confiance dans le silence Réjouis-toi tu es la première des merveilles du Christ Sauveur Réjouis-toi tu récapitules la richesse de sa Parole


Réjouis-toi Échelle en qui Dieu descend sur la terre Réjouis-toi Pont qui unit la terre au ciel

Réjouis-toi merveille inépuisable pour les anges Réjouis-roi Blessure inguérissable pour l’adversaire


Réjouis-toi ineffable Mère de la Lumière Réjouis-toi tu as gardé en ton coeur le Mystère Réjouis-toi en qui est dépassé le savoir des savants Réjouis-toi en qui est illuminée la foi des croyants


Réjouis-toi Épouse inépousée !

La puissance du Très-Haut reposa sur l’Inépousée et comme un jardin au beau fruit, elle porta le Salut pour tous ceux qui désirent le cueillir.

Alléluia, alléluia, alléluia !

Portant le Seigneur dans son sein, Marie partit en hâte chez Élisabeth. Lorsqu’il reconnut la salutation de Marie, l’enfant se réjouit aussitôt, bondissant d’allégresse comme pour chanter à la Mère de Dieu :


Réjouis-toi Jeune pousse au Bourgeon immortel Réjouis-toi Jardin au Fruit qui donne Vie Réjouis-toi en qui a germé le Seigneur notre Ami Réjouis-toi tu as conçu le Semeur de notre vie


Réjouis-toi Champ où germe la Miséricorde en abondance Réjouis-toi Table qui offre la Réconciliation en plénitude Réjouis-toi tu prépares l’Espérance du Peuple en marche Réjouis-toi tu fais jaillir la Nourriture d’Éternité


Réjouis-toi Parfum d’une offrande qui plaît à Dieu Réjouis-toi en qui tout l’univers est réconcilié Réjouis-toi Lieu de la bienveillance de Dieu pour les pécheurs Réjouis-toi notre assurance auprès de Dieu


Réjouis-toi Épouse inépousée !

Joseph le Sage se troubla, secoué par une tempête de pensées contradictoires. Il te vit inépousée et te soupçonna d’un amour caché, toi l’Irréprochable. Mais, apprenant que ce qui avait été engendré en toi venait de l’Esprit-Saint, il s’écria :

Alléluia, alléluia, alléluia !

Quand les bergers entendirent les anges chanter la venue du Christ en notre chair, ils ont couru contempler leur Pasteur reposant sur le sein de Marie en Agneau Immaculé. Ils exultèrent en chantant :


Réjouis-toi Mère de l’Agneau et du Pasteur Réjouis-toi Maison des brebis rassemblées Réjouis-toi Protection contre le loup qui disperse Réjouis-toi en ta chair s’ouvre la Porte qui conduit au Père


Réjouis-toi en qui les cieux se réjouissent avec la terre Réjouis-toi en qui la terre exulte avec les cieux Réjouis-toi tu donnes l’assurance à la parole des Apôtres Réjouis-toi tu donnes la force au témoignage des Martyrs


Réjouis-toi inébranlable soutien de notre foi Réjouis-toi tu sais la splendeur de la grâce Réjouis-toi en qui l’Enfer est dépouillé Réjouis-toi en qui nous sommes revêtus de gloire


Réjouis-toi Épouse inépousée !


Les Mages ont vu l’astre qui conduit à Dieu. Marchant à sa clarté comme on saisit un flambeau, ils ont trouvé la Lumière véritable. Tout proches de Celui que personne n’a jamais vu, ils acclament sa Mère :

Alléluia, alléluia, alléluia !


Ceux qui savent lire les signes des astres ont reconnu dans les bras de la Vierge le Créateur des hommes ; dans les traits de Celui qui a pris condition d’esclave ils ont adoré leur Maître. Avec empressement ils l’honorèrent de leurs présents en chantant à la Toute-Bénie :


Réjouis-toi Mère de l’Astre sans déclin Réjouis-toi Reflet de la clarté de Dieu Réjouis-toi en qui s’éteint la brûlure du mensonge Réjouis-toi en qui s’illumine pour nous la Trinité d’Amour


Réjouis-toi en qui l’inhumaine puissance est défaite Réjouis-toi tu nous montres le Christ Seigneur Ami des hommes Réjouis-toi en qui les idoles païennes sont renversées Réjouis-toi tu nous donnes d’être libérés des oeuvres mauvaises


Réjouis-toi en qui s’éteint l’idolâtrie du feu païen Réjouis-toi en qui nous sommes affranchis du feu des passions Réjouis-toi tu conduis les croyants vers le Christ Sagesse Réjouis-toi Allégresse de toutes les générations


Réjouis-toi Épouse inépousée !


Les Mages s’en retournèrent à Babylone en témoins, porteurs de Dieu. Là ils annoncèrent la Bonne Nouvelle et accomplirent les Écritures en te proclamant devant tous comme Messie. Hérode resta seul, livré à sa sottise, incapable d’entrer dans la louange :

Alléluia, alléluia, alléluia !


Ô Sauveur, tu as porté en Égypte l’éclat de la vérité et tu en as chassé les ténèbres du mensonge. Les idoles du pays de l’esclavage se sont placées sous ta puissance et ceux que tu as ainsi délivrés du péché se tournent vers la Mère de Dieu pour lui chanter :


Réjouis-toi en qui l’homme est relevé Réjouis-toi en qui les démons sont défaits Réjouis-toi tu démasques le piège des idoles


Réjouis-toi Mère où trouve sa perte le Pharaon qui se tient dans l’esclavage du péché Réjouis-toi Rocher d’où jaillit la Source qui abreuve les assoiffés Réjouis-toi Colonne du Feu qui illumine notre marche dans la nuit Réjouis-toi Manteau aussi vaste que 1a Nuée pour ceux qui sont sans recours


Réjouis-toi tu portes le vrai Pain du ciel qui remplace la manne Réjouis-toi Servante du Festin où nous avons part aux réalités du ciel Réjouis-toi Belle terre de la foi où s’accomplit la Promesse Réjouis-toi Pays ruisselant de lait et de miel

Réjouis-toi Épouse inépousée !


Lorsque Siméon fut au seuil de la mort, Seigneur, tu lui fus présenté comme un enfant mais il reconnut en toi la perfection de la Divinité. Plein d’admiration pour ton Être qui n’a pas de fin, il chanta :

Alléluia, alléluia, alléluia !


Le Créateur a fait une Oeuvre Nouvelle lorsqu’il se rendit visible à nos yeux. Il a pris chair dans le sein d’une vierge en la gardant dans son intégrité, pour qu’à la vue de cette merveille nous chantions :


Réjouis-toi Fleur de l’Être inaltérable de Dieu Réjouis-toi Couronne de son amour virginal Réjouis-toi Figure qui resplendit de la Résurrection du Seigneur Réjouis-toi tu partages avec les anges la clarté du Royaume


Réjouis-toi Arbre dont le Fruit splendide nourrit les croyants Réjouis-toi Feuillage dont l’ombre procure la fraîcheur aux multitudes Réjouis-toi tu enfantes la rançon des captifs Réjouis-toi tu portes dans ta chair le Guide des égarés


Réjouis-toi notre Avocate auprès du Juge juste et bon Réjouis-roi en qui arrive le pardon pour la multitude Réjouis-toi Tunique d’espérance pour ceux qui sont nus Réjouis-toi Amour plus fort que tout désir


Réjouis-toi Épouse inépousée !


Quand nous contemplons cet enfantement inhabituel nous devenons étrangers à notre monde habituel et notre esprit se tourne vers les réalités d’en haut. Car le Très-Haut s’est révélé aux hommes dans l’abaissement pour élever ceux qui croient en lui.

Alléluia, alléluia, alléluia !

Le Verbe que rien ne contient a pris chair dans notre condition humaine sans cesser d’être Dieu. En venant habiter le monde d’en-bas, il n’a pas quitté pour autant les réalités d’en-haut, mais il est descendu tout entier dans le sein d’une Vierge qu’il a habitée de sa divinité :


Réjouis-toi Temple du Dieu de toute immensité Réjouis-toi Porche du Mystère enfoui depuis les siècles Réjouis-toi incroyable nouvelle pour les incroyants Réjouis-toi Bonne Nouvelle pour les croyants


Réjouis-toi Vaisseau choisi où vient à nous Celui qui surpasse les Chérubins Réjouis-toi Demeure très sainte de Celui qui siège au-dessus des Séraphins Réjouis-toi en qui les contraires sont conduits vers l’Unité Réjouis-toi en qui se joignent la virginité et la maternité


Réjouis-toi en qui la transgression reçoit le pardon Réjouis-toi en qui le Paradis s’ouvre à nouveau Réjouis-toi Clef du Royaume du Christ Réjouis-toi Espérance des biens éternels


Réjouis-toi Épouse inépousée !


Tous les anges du ciel ont été frappés de stupeur devant la prodigieuse oeuvre de ton Incarnation, Seigneur, car toi le Dieu que nul n’a jamais vu, tu t’es rendu visible à tous et tu as demeuré parmi nous. Tous nous t’acclamons :

Alléluia, alléluia, alléluia !


Devant toi, ô Mère de Dieu, les orateurs bavards sont muets comme des poissons, incapables de dire comment tu as pu enfanter et demeurer vierge. Remplis d’étonnement, nous contemplons en toi le Mystère de la Foi :


Réjouis-toi Trône de la sagesse éternelle Réjouis-toi Écrin du dessein bienveillant de Dieu Réjouis-toi tu conduis les philosophes aux limites de leur sagesse Réjouis-toi tu mènes les savants aux frontières du raisonnement


Réjouis-toi devant qui les esprits subtils deviennent hésitants Réjouis-toi devant qui les littérateurs perdent leurs mots Réjouis-toi devant qui se défont les raisonnements les plus serrés Réjouis-toi car tu montres Celui dont la Parole agit avec puissance


Réjouis-toi en qui nous sommes tirés de l’abîme de l’ignorance Réjouis-toi en qui nous accédons à la plénitude du Mystère de Dieu Réjouis-toi Planche de salut pour ceux qui aspirent à la pleine vie Réjouis-toi Havre de paix pour ceux qui se débattent dans les remous de leur vie


Réjouis-toi Épouse inépousée !


Dans sa volonté de sauver toute sa création, le Créateur de l’univers a choisi d’y venir lui-même. Pour refaire en nous son image à sa ressemblance divine, il est devenu l’Agneau, lui notre Dieu et notre Pasteur.

Alléluia, alléluia, alléluia !


En toi Vierge Marie, Mère de Dieu, trouvent refuge ceux qui ont fait choix de virginité et qui se tournent vers toi. Car le Créateur du ciel et de la terre t’a façonnée, ô Immaculée, en venant demeurer dans ton sein. Tous, il nous apprend à t’acclamer :


Réjouis-toi Mémorial de la virginité Réjouis-toi Porte du Salut Réjouis-toi premier fruit du Royaume Nouveau Réjouis-toi en qui resplendit la merveille du don gratuit


Réjouis-toi en qui sont régénérés les esprits accablés Réjouis-toi en qui sont fortifiés ceux que leur passé a blessé Réjouis-toi car tu enfantes Celui qui nous délivre du Séducteur Réjouis-toi car tu nous donnes la Source de la chasteté


Réjouis-toi Chambre nuptiale où Dieu épouse notre humanité Réjouis-toi tu confies au Dieu d’amour ceux qui se donnent à lui Réjouis-toi Nourriture du Seigneur pour ceux qui ont pris le chemin de virginité Réjouis-toi tu conduis les croyants à l’intimité avec l’Époux


Réjouis-toi Épouse inépousée !


Toutes nos hymnes de louange sont impuissantes à chanter, Seigneur, la profusion de ta miséricorde infinie. Seraient-elles aussi nombreuses que le sable de la mer, jamais elles ne parviendraient à égaler la richesse du don que tu nous as fait.

Alléluia, alléluia,, alléluia !


Nous contemplons dans la Vierge sainte le flambeau qui a porté la Lumière dans les ténèbres. Embrasée par la flamme du Verbe de Dieu qu’elle accueille dans sa chair, elle conduit tout homme à la connaissance de Dieu, illuminant l’intelligence de sa Splendeur. Joyeusement nous l’acclamons :


Réjouis-toi Aurore du Soleil levant Réjouis-toi Flambeau qui porte la Lumière véritable Réjouis-toi Éclat de Celui qui illumine notre coeur Réjouis-toi devant toi l’Ennemi est frappé de terreur


Réjouis-toi Porte de la Lumière étincelante Réjouis-toi Source d’une Eau jaillissant en Vie éternelle Réjouis-toi Image vivante de la piscine du baptême Réjouis-toi en qui nous sommes lavés de la souillure du péché


Réjouis-toi Bassin où nous est donné un esprit renouvelé Réjouis-toi Coupe où nous puisons la Joie Réjouis-toi en qui nous respirons le parfum du Christ Réjouis-toi Source intarissable d’allégresse


Réjouis-toi Épouse inépousée !


Il a voulu faire grâce des anciennes dettes à tous les hommes. De lui-même il est venu habiter chez les siens, parmi ceux qui vivaient loin de sa Grâce et déchirant leurs billets de créance, il entendit de toutes les bouches sortir cette acclamation :

Alléluia, alléluia, alléluia !


Nous voulons, ô Mère de Dieu, chanter ton enfantement, te louer comme le Temple vivant que le Seigneur a sanctifié et glorifié en demeurant dans ton sein, lui qui tient tout dans sa Main :


Réjouis-toi Tabernacle du Dieu vivant Réjouis-toi Sanctuaire qui contient le Seul Saint Réjouis-toi Arche de la Nouvelle Alliance dorée par l’Esprit Réjouis-toi Trésor inépuisable de la Vie


Réjouis-toi Diadème de grand prix pour les gouvernants Réjouis-toi Gloire vénérable des prêtres de Dieu Réjouis-toi Solide Tour qui garde l’Église Réjouis-toi Rempart inébranlable de la Cité


Réjouis-toi en qui surgit le Trophée de notre victoire Réjouis-toi en qui sonne la déroute de notre Ennemi Réjouis-toi Guérison de mon corps Réjouis-toi Salut de mon âme


Réjouis-toi Épouse inépousée !


Ô Mère bénie entre toutes, toi qui as enfanté le Verbe de Dieu, le Seul Saint, reçois l’offrande de notre prière. Garde-nous de tout malheur et de toute menace, nous qui te chantons d’un même coeur :

Alléluia, alléluia, alléluia !

3 vues
bottom of page