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Jeudi, 18ème semaine du T.O. — année impaire

Vade retro Satanas



Jésus donnant les clés à saint Pierre

Jean-Auguste-Dominique Ingres (Montauban, 1780 - Paris, 1867)

Huile sur toile, 2,80 x 2,17 cm, 1820

Musée du Louvre, Paris (France)


Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 16, 13-23)

En ce temps-là, Jésus, arrivé dans la région de Césarée-de-Philippe, demandait à ses disciples : « Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ? » Ils répondirent : « Pour les uns, Jean le Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres encore, Jérémie ou l’un des prophètes. » Jésus leur demanda : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Alors Simon-Pierre prit la parole et dit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! » Prenant la parole à son tour, Jésus lui dit : « Heureux es-tu, Simon fils de Yonas : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle. Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. » Alors, il ordonna aux disciples de ne dire à personne que c’était lui le Christ. À partir de ce moment, Jésus commença à montrer à ses disciples qu’il lui fallait partir pour Jérusalem, souffrir beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes, être tué, et le troisième jour ressusciter. Pierre, le prenant à part, se mit à lui faire de vifs reproches : « Dieu t’en garde, Seigneur ! cela ne t’arrivera pas. » Mais lui, se retournant, dit à Pierre : « Passe derrière moi, Satan ! Tu es pour moi une occasion de chute : tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. »


Méditation

Jésus : Non, ce n’est pas une question de popularité, ni de propagande, encore moins de prestige. Simplement découvrir ce qu’ils ont compris… Le peuple, semble-t-il, ne voit en moi qu’un prophète, tels Élie ou Jérémie, ou alors le retour d’un mort comme Jean le Baptiste. Je peux les comprendre, ils ne sont pas avec moi tous les jours. Mais mes disciples, eux qui marchent depuis tant de mois à mes côtés, eux qui m’écoutent parler du Royaume et de mon Père des Cieux, qu’ont-ils donc compris ? Un seul répondra à ma question, devançant tous les autres, et leur coupant l’herbe sous le pied. C’est Pierre, mon Pierre auquel je suis tant attaché. J’aime son humanité, mais aussi ses coups de sang. Il fera un bon Pape pour mon Église naissante : courageux (mais pas téméraire…), orgueilleux (mais assez humble pour le reconnaître), arrogant (mais assez modeste pour faire pénitence), bravache (mais avec assez de coeur pour pleurer ses erreurs)… Mais surtout assez simple pour laisser l’Esprit l’habiter et le guider dans ses paroles.


Pierre : Je ne sais vraiment ce qui m’a pris ! C’est venu en moi comme une fulgurante pensée. Ce fut plus fort que moi, je ne pouvais que dire cette phrase qui envahissait mon coeur, mon esprit et mon corps : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! » J’en fus moi-même surpris, à un tel point que les autres ne surent quoi ajouter. Tout était dit ! Il est le Christ, le Messie, le Fils de Dieu. Comment ne pouvais-je pas le confesser aux yeux de tous ? Je sentais bien que ça ne venait pas de ma pauvre intelligence, d’un raisonnement quelconque. Une sorte de révélation, d’évidence, qui venait de prendre possession de moi. Mais le Seigneur m’a alors expliqué. C’est donc ça l’Esprit dont il nous parle, cette force, cette énergie divine qui vient même placer dans notre bouche les mots les plus justes, ce souffle qui vient lever le voile sur ce qui nous était encore caché, ce feu qui vient brûler nos âmes sans consumer notre humanité. J’en suis tout retourné, comme par une conversion subite. Mais ce n’était que la première phase de ma conversion… Voici que maintenant le Maître m’appelle à être la pierre de fondation de son Église. Mais qu’est-ce donc qu’une Église ? Je ne connais pas, ce mot-là ! Peut-être une sorte d’assemblés de ses disciples, un peu comme aujourd’hui. Je ne veux pas être leur chef : c’est Jésus notre chef, notre tête. Mais si l’Esprit vient à mon aide, je peux essayer de les guider. La mission semble à la fois simple et compliquée : une question de clés… Les clés du Royaume. Lier et délier. Mais quoi donc ? Si je pouvais déjà délier mes frères (et surtout moi-même) des péchés, des mauvaises pensées, des coups de colère, de l’orgueil, ce ne serait pas mal. Et si je pouvais lier chacun aux autres, faire de chacun un chaînon d’une chaîne de foi et d’amour, ce serait encore mieux. J’espère ne pas avoir à lier les hommes de chaînes d’esclavages et de contraintes, et encore moins de les délier de leurs promesses et de leurs obligations, de leurs devoirs. Mais plutôt les délier de Satan pour les lier au Père des Cieux.


Jésus : Leur enthousiasme fait plaisir à voir. Mais il leur masque parfois la réalité. C’est curieux comme ils refusent de comprendre que pour les sauver je dois prendre le chemin de la Croix. Il le comprendront bien assez vite, en particulier pour trois d’entre eux lors de la Transfiguration. Mais, même si les hommes doivent encore attendre que l’Esprit leur ouvre le coeur pour qu’ils comprennent que je suis le Messie, mes disciples doivent se préparer au chemin de la Passion, qu’ils partageront d’une façon ou d’une autre avec moi. Je sais que ça leur fait peur. J’imagine ce qu’ils ressentent de voir notre parcours aboutir à sa fin. Puisse la Transfiguration leur faire comprendre que ce n’est qu’un passage, une Pâque…


Pierre : Ah ça non ! Pas question de mort pour lui. Non, il doit rester avec nous. Je refuse d’imaginer que cela soit possible. On ne le laissera pas partir comme ça. Pas question qu’il nous abandonne. Je ferai même rempart de mon corps s’il le faut. Pour ne pas dire que je l’empêcherai de se laisser livrer. Ah ça non !


Jésus : Mon pauvre Pierre. Tu fais vite demi-jour. Il y a quelques instants, je te confiais les clés du Royaume, et voilà que tu veux déjà en fermer les portes ! Quand comprendras-tu que cette porte, justement, c’est celle de me livrer, de mourir pour votre salut, de m’offrir en sacrifice pour vous ouvrir de nouveau le Paradis ?


Que les hommes ont du mal à se mettre dans le fil des pensées de Dieu ! C’est bien normal, en fait, comment le pourraient-ils vraiment, eux qui ne sont que des hommes. Mais pour les aider, je vais leur envoyer mon Esprit, pour qu’il les éclaire, afin qu’il prépare leur coeur au passage vers le Royaume. Un Esprit qui leur permettra de reprendre pour eux cette injonction que je viens de faire à Pierre : Vade retro Satanas ! Pour qu’eux-mêmes la prononcent à chaque fois qu’ils se rendront compte que leurs pensées ne sont qu’humaines et qu’elles s’éloignent de Dieu ; pour qu’à chaque fois que leurs pensées seront dominées par le mal, ils osent en faire le bouclier qui repoussera Satan, pour qu’ils puissent chaque fois comprendre que Dieu doit être le premier servi…

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