L’être étonnant que je suis

Dieu le Père
Cima da Conegliano (Conegliano, 1459 - Venise, 1517)
Tempera sur panneau, 240 x 285 cm, 1499
Musée Bonnat-Helleu, Bayonne (France)
Psaume 138
Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais !
Tu sais quand je m’assois, quand je me lève ;
de très loin, tu pénètres mes pensées.
Que je marche ou me repose, tu le vois,
tous mes chemins te sont familiers.
C’est toi qui as créé mes reins,
qui m’as tissé dans le sein de ma mère.
Je reconnais devant toi le prodige,
l’être étonnant que je suis.
Scrute-moi, mon Dieu, tu sauras ma pensée ;
éprouve-moi, tu connaîtras mon cœur.
Vois si je prends le chemin des idoles,
et conduis-moi sur le chemin d’éternité.
Méditation
Rien n’échappe à Dieu ! Il voit tout. Mais ne nous leurrons pas, Dieu n’est pas un père Fouettard qui chercherait scrupuleusement toutes nos fautes et faiblesses pour nous réprimander. Au risque de faire une erreur théologique (je ne suis pas théologien…), il me semble que Dieu est amoureux de l’homme, amoureux comme un frère, comme un père, mais aussi comme une mère. Et même si l’on distingue sans difficulté les faiblesses de l’autre, on l’aime avec ça. Peut-être même que Dieu nous aime par notre faiblesse car, comme l’attestera saint Paul (2 Cor 12, 7-10) : « Et ces révélations dont il s’agit sont tellement extraordinaires que, pour m’empêcher de me surestimer, j’ai reçu dans ma chair une écharde, un envoyé de Satan qui est là pour me gifler, pour empêcher que je me surestime. Par trois fois, j’ai prié le Seigneur de l’écarter de moi. Mais il m’a déclaré : « Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse. » C’est donc très volontiers que je mettrai plutôt ma fierté dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ fasse en moi sa demeure. C’est pourquoi j’accepte de grand cœur pour le Christ les faiblesses, les insultes, les contraintes, les persécutions et les situations angoissantes. Car, lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort. » Oui, Paul en a fait l’expérience : il fut éprouvé et Dieu a connu son cœur.
Notre monde est souvent narcissique (il suffit de penser aux selfies…). Ce psaume ne nous invite pas à nous enorgueillir bêtement de nous-mêmes, mais à reconnaître que la créature de Dieu que nous sommes est un être étonnant ! Étonnant parfois de stupidité, certes, mais surtout étonnant car capable de plus qu’il ne pourrait jamais imaginer. Saint Augustin dira même que nous sommes « Capax Dei », capables de Dieu. Et cela c’est étonnant.
Ce mot est révélateur : ce qui est étonnant, c’est ce qui crée un coup de tonnerre, qui détonne ! Oui, le chrétien doit « détonner » en ce monde et laisser Dieu donner des coups de tonnerre dans sa vie, quitte à tout bouleverser. Ayons l’humilité de dire avec le psalmiste : « Je reconnais devant toi le prodige, l’être étonnant que je suis » !