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Mercredi, 9e semaine du T.O. — Année impaire

Insultes et guérisons



Tobie et l’ange

Dirck van Baburen (Utrecht, 1595 – Utrecht, 1624)

Huile sur toile, date et dimensions inconnues

Corsham Court, Wiltshire (Royaume-Uni)


Lecture du livre de Tobie (Tb 3, 1-11.16-17a)

En ces jours-là, la mort dans l’âme, moi, Tobith, je gémissais et je pleurais ; puis, au milieu de mes gémissements, je commençai à prier : « Tu es juste, Seigneur, toutes tes œuvres sont justes, tous tes chemins, miséricorde et vérité ; c’est toi qui juges le monde. Et maintenant, Seigneur, souviens-toi de moi et regarde : ne me punis pas pour mes péchés, mes égarements, ni pour ceux de mes pères, qui ont péché devant toi et refusé d’entendre tes commandements. Tu nous as livrés au pillage, à la déportation et à la mort, pour être la fable, la risée, le sarcasme de toutes les nations où tu nous as disséminés. Et maintenant encore, ils sont vrais les nombreux jugements que tu portes contre moi, pour mes péchés et ceux de mes pères, car nous n’avons pas pratiqué tes commandements ni marché dans la vérité devant toi. Et maintenant, agis avec moi comme il te plaira, ordonne que mon souffle me soit repris, pour que je disparaisse de la face de la terre et devienne, moi-même, terre. Pour moi, mieux vaut mourir que vivre, car j’ai entendu des insultes mensongères, et je suis accablé de tristesse. Seigneur, ordonne que je sois délivré de cette adversité, laisse-moi partir au séjour éternel, et ne détourne pas de moi ta face, Seigneur. Car, pour moi, mieux vaut mourir que connaître tant d’adversités à longueur de vie. Ainsi, je n’aurai plus à entendre de telles insultes. » Or ce jour-là, Sarra, la fille de Ragouël d’Ecbatane en Médie, se fit, elle aussi, insulter par une jeune servante de son père : elle avait été mariée sept fois, et Asmodée, le pire des démons, tuait les maris avant qu’ils ne se soient approchés d’elle. Donc, la servante dit à Sarra : « C’est toi qui as tué tes maris ! En voilà déjà sept à qui tu as été donnée en mariage, et d’aucun d’entre eux tu n’as porté le nom. Pourquoi nous fouetter, sous prétexte que tes maris sont morts ? Va les rejoindre : puissions-nous ne jamais voir de toi un fils ni une fille ! » Ce jour-là, Sarra, la mort dans l’âme, se mit à pleurer. Et elle monta dans la chambre haute de la maison de son père avec l’intention de se pendre. Mais, à la réflexion, elle se dit : « Eh bien, non ! On irait insulter mon père et lui dire : “Tu n’avais qu’une fille, une fille très aimée, et elle s’est pendue à cause de ses malheurs !” Je ferais ainsi descendre mon vieux père plein de tristesse au séjour des morts. Mieux vaut pour moi ne pas me pendre, mais supplier le Seigneur de me faire mourir, pour que je n’aie plus à entendre de telles insultes à longueur de vie. » À l’instant même, elle étendit les mains vers la fenêtre et fit cette prière : « Béni sois-tu, Dieu de miséricorde ; béni soit ton nom pour les siècles ; que toutes tes œuvres te bénissent à jamais ! » À cet instant précis, la prière de l’un et de l’autre fut portée en présence de la gloire de Dieu où elle fut entendue. Et Raphaël fut envoyé pour les guérir tous deux : à Tobith pour enlever le voile blanchâtre qui couvrait ses yeux afin que, de ses yeux, il voie la lumière de Dieu, et à Sarra, fille de Ragouël, pour la donner en mariage à Tobie, fils de Tobith, et expulser d’elle Asmodée, le pire des démons ; en effet c’est à Tobie que revenait le droit de l’épouser plutôt qu’à tous ses prétendants.


Méditation

Pauvre Sarra qui se fait insulter et accuser par sa servante d’avoir tuer ses maris. Pauvre Tobith qui sombre dans le désespoir et ne supporte plus sa vie, lui qui ne peut retrouver la vue. Tous les deux sont profondément blessés. Nous utilisons souvent ce mot « blessé » mais avons-nous conscience de sa portée ? Être blessé dans son honneur, dans son âme, dans son coeur, etc. Est comparable à une blessure physique. Une blessure qui ouvre une plaie béante, qui fait souffrir, qui risque de s’infecter et de se propager à tous le corps. Une blessure comparable à un coup de poignard.


L’insulte, le dénigrement, la médisance et la calomnie sont plus blessants, plus douloureux qu’une lame enfoncée dans l’abdomen (ou pour les moins courageux, dans le dos)... À chaque fois que nous faisons « courir des bruits » sur quelqu’un, quand nous cédons à la rumeur, où quand nous qualifions une personne de nulle (nul, c’est zéro, c’est-à-dire rien), ou quand nous nous moquons de ses infirmités, de ses faiblesses, de ses difficultés, nous lui donnons un coup de couteau « virtuel ». Et nous blessons notre frère plus gravement que nous ne pouvons l’imaginer. Parfois, les coups sont même mortels...


Première leçon de ce texte : évitons insultes, rumeurs, calomnies, médisances. Et n’oublions pas la règle d’or du Premier Testament (dans le même libre de Tobie 4, 15) : « Ne fais à personne ce que tu détestes, et que cela n’entre dans ton cœur aucun jour de ta vie. » et que Jésus positivera (Mt 7, 12) : « Donc, tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux, vous aussi : voilà ce que disent la Loi et les Prophètes. » Personnellement, je n’aime pas être insulté, calomnié, médit. Alors pourquoi le ferais-je aux autres ?


Deuxième leçon : Dieu seul peut nous guérir durablement. Tobith est désespéré, Sarra ne supporte plus l’insulte. Et c’est Dieu, par l’entremise de l’archange Raphaël qui va les guérir. Tobith retrouve la vue, Sarra retrouve un mari pieux. Et si Dieu a écouté leur souffrance, c’est parce que, plutôt que de se lamenter sur leur sort, ils se sont tournés vers le Seigneur : « À cet instant précis, la prière de l’un et de l’autre fut portée en présence de la gloire de Dieu où elle fut entendue. » Même si nous avons l’impression de ne rien avoir à offrir au Seigneur, à l’instar de saint Jérôme, offrons-lui nos souffrances pour qu’il les transforme en grâces. Même si nos mains sont vides, et même blessées et douloureuses, il vient les transformer, les guérir, les sanctifier. Jésus ne l’a-t-il pas dit (Mc 11, 24) : « C’est pourquoi, je vous le dis : tout ce que vous demandez dans la prière, croyez que vous l’avez obtenu, et cela vous sera accordé. »


Dernière leçon : nous confions-nous suffisamment à notre ange gardien ?

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