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Sainte Trinité (A)

Procession...



Le Retable de Boulbon

Anonyme

Provient de l'église Saint-Marcellin de Boulbon (Bouches-du-Rhône) à laquelle il aurait été donné par le chapitre de l'église Saint-Agricol d'Avignon vers 1530

Peinture à l'huile sur bois, transposée sur toile. 1,72 m x 2,28 m, vers 1450

Musée du Louvre, Paris (France)


Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 3, 16-18

Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. Celui qui croit en lui échappe au Jugement ; celui qui ne croit pas est déjà jugé, du fait qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.


"Le musée du Louvre conserve, depuis un don fait en 1904, une œuvre intense, énigmatique, étonnante de silence et d'austérité. " François Boespflug, La Trinité dans l'Art d'Occident (1400-1460), p. 255

Histoire

Le Retable de Boulbon a été peint vers 1450 ; l'artiste reste, à ce jour, inconnu. Il est contemporain du Couronnement de la Vierge (1453-1454, musée Pierre de Luxembourg, Villeneuve-lès-Avignon) et de la Pietà de Villeneuve-lès-Avignon (autour de 1455, musée du Louvre) d'Enguerrand Quarton.


Exécuté à l'origine pour l'église Saint-Agricol d'Avignon, il aurait été donné par le chapitre Saint-Agricol (fondé par le pape Jean XXII en 1316) à Saint-Marcellin de Boulbon vers 1537/1539. (Le prieuré Saint-Marcellin fut uni à Saint-Agricol en 1456). Il fut placé derrière l'autel de Saint-Marcellin, alors église paroissiale du village. Il est signalé dans les archives des visites pastorales: "1655: Chapelle de saint Marcellin; le mestre autel est orné d'un fort ancien et assez beau tableau ..."


En 1882 il est transféré dans la sacristie de la nouvelle église Saint-Joseph construite en 1875. Très abimé, le bois sur lequel il était peint étant vermoulu et la paroisse ne pouvant le faire restaurer, il est vendu en 1905 pour la somme de cinq mille francs or. En 1923 il est transposé du bois sur toile avant d'être exposé à une place d'honneur parmi les Primitifs provençaux.


Le tableau représente le donateur agenouillé (commanditaire de l'œuvre), Jean de Montagnac, chanoine de Saint-Agricol, présenté par l'évêque saint Agricol à la Sainte Trinité.


Une œuvre intense et énigmatique... Comme l'est la Trinité ! Mais avant tout chose, peut-être est-il utile de regarder ce que l'œuvre nous montre.


Des personnages

Nous sommes dans une pièce, ouverte à gauche par une porte qui donne sur un village en contrebas. Devant la porte, deux personnages : Saint-Agricol, bâton pastoral en main, patron de l'église (à qui était destiné le retable) présente à la Sainte Trinité le chanoine Jean de Montanac (dont le chapeau est posé à ses côtés), le donateur à genoux. Deux phrases en latin sortent de leur bouche : "Telle est notre foi" (Saint Agricol) et "Sauveur du monde, aie pitié de moi" (Jean de Montanac).


Devant eux, Jésus le Christ, couronné d'épines, est debout dans un caveau ouvert d'où l'on aurait extrait le cercueil de bois au premier plan, les plaies de la Croix apparentes. Son regard en biais semble s'adresser au donateur qui le prie. Autour de lui, on repère les divers instruments de la Passion : la colonne de la flagellation et son fouet, les joncs, sur la colonne les cordes nouées qui lièrent Jésus (faut-il voir des signes dans la disposition des cordes et des noeuds ?), la lance et son éponge, les clous de la Croix, le Titulus (l'inscription I.N.R.I.) Ses mains sont jointes, comme si elles étaient encore liées, ou comme pour une mise au tombeau (elles sont assez comparables à celles que l'on voit sur le Saint-Suaire).


Des objets

D'autres objets, parfois surprenants, sont disséminés sur le tableau : un petite cigogne en bas à droite, une main en haut à droite, une lampe à huile près de la tête du Christ, une pierre au pied du tombeau, une poutre qui traverse la scène (est-ce le patibulum de la croix ?) ou un bénitier accrocher près de la fenêtre. À gauche et à droite de la scène, des armoiries : à côté de l'évêque les armes du chapitre Saint-Agricol (cigogne d'argent tenant dans son bec un serpent), le nom de saint Agricol et les armes du pape Jean XXII.


Sur la paroi du fond, une fenêtre est ouverte laissant apparaître le visage du Père, représenté en vieil homme barbu. On dirait la tête de Dieu regardant à la fenêtre de l'Arche de Noé avant d'en fermer la porte (Gn 7, 16). Entre la bouche du Père et celle du Fils semble apparaître cette colombe auréolée, représentation traditionnelle de l'Esprit-Saint (Lc 3, 22), comme si elle naissait de leurs souffles.


Entre terre et ciel

La première impression que l'on pourrait avoir est que ce retable peut se lire dans un quadrilatère coupé en croix, dont le Christ est la médiane : à sa gauche le monde des ténèbres avec les instruments de la Passion, à sa droite le monde de la Grâce qui ouvre sur un chemin qui doit monter vers la Jérusalem céleste. Mais aussi dans l'autre sens, sous la barre de bois, le monde des hommes, et au-dessus le monde de Dieu. Et lui, Jésus, est celui qui fait le lien entre tous, il en est la charnière. Même la lampe à huile, celle de la présence, mais encore celle des Vierges sages, sont au ciel avec le Père et l'Esprit. C'est la Croix qui les réunit, comme celle que tient l'évêque. Jésus lui-même est entre les deux mondes. Sa nature humaine et historique est plantée dans ce monde, inscrite dans la mort, sa nature divine et christique est au ciel, le Christ chef de l'Église, Caput Mundi, est auréolé, couronné dans les cieux.


Une œuvre trinitaire

L'époque insistait beaucoup sur ces questions théologiques. Chaque chrétien se devait de comprendre et croire que Jésus participait à la vie trinitaire, mais qu'il avait aussi partagé notre condition humaine. Le peintre nous donne une belle vision de la Trinité. Le Père et le Fils sont unis. Et c'est l'Esprit qui les réunit. On retrouve là toute la controverse du Filioque (il procède du Père et du Fils). Cette double procession d'amour entre le Père et le Fils nous est montrée par les ailes de l'Esprit qui unissent les deux bouches. Le Père aime le Fils et le Fils aime le Père, et cet amour continue, en continuel mouvement, c'est l'Esprit.


Une lecture pour aujourd'hui

Comme le donateur, nous sommes en prière devant Jésus, et il est vrai que notre prière est souvent christocentrique. Mais quand nous l'implorons, nos paroles sont bénies (le bénitier traverse la parole). Elles le rejoignent et il jette un regard sur notre misère. Et ce d'autant plus si nous sommes soutenus par la prière des saints. Jésus est venu au cœur de nos vies humaines, au cœur de notre mort. Il connaît tous les instruments qui continuent à nous flageller et à nous lier chaque jour. Même si nos yeux de chair ont parfois du mal à le voir, portons notre regard un peu plus loin, et voyons cette petite lumière qui illumine les ténèbres, signe de sa présence, rappel de la petite fille espérance (Charles Péguy, Le porche de la deuxième vertu). En contemplant Jésus le Christ, pleinement homme, nous pourrons voir avec les yeux de la foi, Jésus pleinement Dieu, qui par sa Parole, dans l'Esprit, nous invite à voir son Père : "Qui me voit, voit le Père" (Jn 12, 45). Et ce Père jette continuellement un regard, par son Fils, dans l'arche de nos vies. Et ce Père, avec son Fils, nous envoie l'Esprit qui semble fondre sur nos vies, éclairer nos ténèbres, nous soulager de nos misères, lui le Paraclet.


Appelés à participer

Nous sommes appelés à participer à cette vie trinitaire. Il n'est qu'une seule porte d'entrée : Jésus. Mais plusieurs routes : celle de notre prière, celle notre participation à ses souffrances, celle de notre foi, celle de notre espérance. Et il reste cette mystérieuse main. Nul ne sait exactement ce qu'elle fait là ! Encore moins ce qu'elle signifie. Est-ce la main de Judas qui reçut les trente deniers ? À moins que ce soit la tienne ? La mienne ? Timidement, nous essayons de rejoindre le Père, passant par la Croix de Jésus, guidés par la Lumière de l’Esprit, malgré toutes nos trahisons.


Homélie de saint Jean Chrysostome (+ 407)

Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle (Jn 3,16).

Vous voyez la cause de l'avènement du Fils de Dieu : il est venu pour que tous ceux qui devaient périr trouvent, par la foi en lui, l'accès au salut. Qui aurait pu imaginer une générosité pareille, au-delà de tout éloge ? Par le don du baptême, Dieu accorde à notre nature le pardon de tous nos péchés ! Non seulement ici la pensée est impuissante, mais la parole est incapable de dénombrer les autres bienfaits de Dieu. Si nombreux qu'ils soient, je suis obligé d'en omettre encore davantage. Que serait-ce donc, si l'on songeait encore à ce chemin de la conversion que Dieu, dans son indicible amour des hommes, a donné au genre humain, ainsi qu'à ses prescriptions merveilleuses grâce auxquelles, si nous le voulons, même après le bienfait du baptême, nous pourrons attirer la grâce d'en haut !

Vous voyez, mes enfants, l'abîme des bienfaits de Dieu ! Vous voyez combien leur énumération est longue, bien que nous n'en ayons encore rappelé qu'une faible partie ! Comment, en effet, le langage humain pourrait-il dénombrer tout ce que Dieu a fait pour nous ? Mais si grands et si nombreux que soient ces bienfaits, ils sont plus ineffables et plus grands encore, ceux qu'il a promis pour la vie future à ceux qui marchent sur le chemin de la vertu. Et, pour nous montrer en peu de mots l'excès de leur grandeur, saint Paul nous dit : Ce que personne n'avait vu de ses yeux ni entendu de ses oreilles, ce que le coeur de l'homme n'avait pas imaginé, ce qui avait été préparé pour ceux qui aiment Dieu (1Co 2,9).

Voyez-vous l'excellence de ces bienfaits? Voyez-vous comme ils sont au-dessus de toutes les idées de l'homme ? Ce que le coeur de l'homme n'avait pas imaginé, c'est l'expression de saint Paul. Si nous voulons récapituler toutes ces merveilles, si nous voulons en rendre grâce selon nos forces, nous pourrons attirer sur nous encore plus de grâces divines et grandir en vertu. Le souvenir des bienfaits de Dieu nous aide à affronter les labeurs de la vertu, à mépriser les biens terrestres, pour nous ouvrir à l'auteur de tous ces dons et augmenter, de jour en jour, l'amour que nous lui témoignons.


Prière

Dieu notre Père, tu as envoyé dans le monde ta Parole de vérité et ton Esprit de sainteté pour révéler aux hommes ton admirable mystère; donne-nous de professer la vraie foi en reconnaissant la gloire de l'éternelle Trinité, en adorant son Unité toute-puissante. Par Jésus Christ.


Ô mon Dieu, Trinité que j'adore (Bienheureuse Elisabeth de la Trinité)

Ô mon Dieu, Trinité que j'adore, aidez-moi à m'oublier entièrement pour m'établir en vous, immobile et paisible comme si déjà mon âme était dans l'éternité. Que rien ne puisse troubler ma paix, ni me faire sortir de vous, ô mon Immuable, mais que chaque minute m'emporte plus loin dans la profondeur de votre Mystère. Pacifiez mon âme, faites-en votre ciel, votre demeure aimée et le lieu de votre repos. Que je ne vous y laisse jamais seul, mais que je sois là tout entière, tout éveillée en ma foi , tout adorante, toute livrée à votre Action créatrice.

Ô mon Christ aimé crucifié par amour, je voudrais être une épouse pour votre Coeur, je voudrais vous couvrir de gloire, je voudrais vous aimer... jusqu'à en mourir ! Mais je sens mon impuissance et je vous demande de me « revêtir de vous même », d'identifier mon âme à tous les mouvements de votre âme, de me submerger, de m'envahir, de vous substituer à moi, afin que ma vie ne soit qu'un rayonnement de votre Vie. Venez en moi comme Adorateur, comme Réparateur et comme Sauveur. Ô Verbe éternel, Parole de mon Dieu, je veux passer ma vie à vous écouter, je veux me faire tout enseignable, afin d'apprendre tout de vous. Puis, à travers toutes les nuits, tous les vides, toutes les impuissances, je veux vous fixer toujours et demeurer sous votre grande lumière ; ô mon Astre aimé, fascinez-moi pour que je ne puisse plus sortir de votre rayonnement.

Ô Feu consumant, Esprit d'amour, « survenez en moi » afin qu'il se fasse en mon âme comme une incarnation du Verbe : que je Lui sois une humanité de surcroît en laquelle Il renouvelle tout son Mystère. Et vous, ô Père, penchez-vous vers votre pauvre petite créature, « couvrez-la de votre ombre », ne voyez en elle que le « Bien-Aimé en lequel vous avez mis toutes vos complaisances »

Ô mes Trois, mon Tout, ma Béatitude, Solitude infinie, Immensité où je me perds, je me livre à vous comme une proie. Ensevelissez-vous en moi pour que je m'ensevelisse en vous, en attendant d'aller contempler en votre lumière l'abîme de vos grandeurs.

21 novembre 1904 (Notes Intimes 15)


Te Deum

À toi Dieu, notre louange !

Nous t'acclamons, tu es Seigneur !

À toi Père éternel,

L’hymne de l’univers.


Devant toi se prosternent les archanges,

les anges et les esprits des cieux ;

ils te rendent grâce ;

ils adorent et ils chantent :


Saint, Saint, Saint, le Seigneur,

Dieu de l'univers ;

le ciel et la terre sont remplis de ta gloire.


C'est toi que les Apôtres glorifient,

toi que proclament les prophètes,

toi dont témoignent les martyrs ;

c'est toi que par le monde entier

l'Église annonce et reconnaît.


Dieu, nous t'adorons :

Père infiniment saint,

Fils éternel et bien-aimé,

Esprit de puissance et de paix.


Christ, le Fils du Dieu vivant,

le Seigneur de la gloire,

tu n'as pas craint de prendre chair

dans le corps d'une vierge

pour libérer l'humanité captive.


Par ta victoire sur la mort,

tu as ouvert à tout croyant

les portes du Royaume ;

tu règnes à la droite du Père ;

tu viendras pour le jugement.


Montre-toi le défenseur et l'ami

des hommes sauvés par ton sang :

prends-les avec tous les saints

dans ta joie et dans ta lumière.

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