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Vendredi, 34e semaine du T.O. — année impaire

Quatre bêtes énormes sortirent de la mer -



La vision de Daniel,

Anonyme,

Beatus de Silos, ms 11695, folio 240v,

Enluminure sur parchemin, 38 x 24 cm, entre 1091 et 1109,

British Library, Londres (Royaume-Uni)


Lecture du livre du prophète Daniel (Dn 7, 2-14)

Daniel prit la parole et dit : « Au cours de la nuit, dans ma vision, je regardais. Les quatre vents du ciel soulevaient la grande mer. Quatre bêtes énormes sortirent de la mer, chacune différente des autres. La première ressemblait à un lion, et elle avait des ailes d’aigle. Tandis que je la regardais, ses ailes lui furent arrachées, et elle fut soulevée de terre et dressée sur ses pieds, comme un homme, et un cœur d’homme lui fut donné. La deuxième bête ressemblait à un ours ; elle était à moitié debout, et elle avait trois côtes d’animal dans la gueule, entre les dents. On lui dit : “Lève-toi, dévore beaucoup de viande !” Je continuais à regarder : je vis une autre bête, qui ressemblait à une panthère ; et elle avait quatre ailes d’oiseau sur le dos ; elle avait aussi quatre têtes. La domination lui fut donnée. Puis, au cours de la nuit, je regardais encore ; je vis une quatrième bête, terrible, effrayante, extraordinairement puissante ; elle avait des dents de fer énormes ; elle dévorait, déchiquetait et piétinait tout ce qui restait. Elle était différente des trois autres bêtes, et elle avait dix cornes. Comme je considérais ces cornes, il en poussa une autre, plus petite, au milieu ; trois des premières cornes furent arrachées devant celle-ci. Et cette corne avait des yeux comme des yeux d’homme, et une bouche qui tenait des propos délirants. « Je continuai à regarder : des trônes furent disposés, et un Vieillard prit place ; son habit était blanc comme la neige, et les cheveux de sa tête, comme de la laine immaculée ; son trône était fait de flammes de feu, avec des roues de feu ardent. Un fleuve de feu coulait, qui jaillissait devant lui. Des milliers de milliers le servaient, des myriades de myriades se tenaient devant lui. Le tribunal prit place et l’on ouvrit des livres. Je regardais, j’entendais les propos délirants que vomissait la corne. Je regardais, et la bête fut tuée, son cadavre fut jeté au feu. Quant aux autres bêtes, la domination leur fut retirée, mais une prolongation de vie leur fut donnée, pour une période et un temps déterminés. Je regardais, au cours des visions de la nuit, et je voyais venir, avec les nuées du ciel, comme un Fils d’homme ; il parvint jusqu’au Vieillard, et on le fit avancer devant lui. Et il lui fut donné domination, gloire et royauté ; tous les peuples, toutes les nations et les gens de toutes langues le servirent. Sa domination est une domination éternelle, qui ne passera pas, et sa royauté, une royauté qui ne sera pas détruite. »


Méditation

Pour commencer, rappelez-vous l’image que je vous avais proposé lundi. Elle fait le lien entre l’interprétation du songe du roi et la vision de ce jour :



Chacune des bêtes correspond donc, comme pour les diverses parties de la statue, à une empire qui va succéder à Babylone. Mais la quatrième bête a une particularité sur les autres : ses dix cornes et la nouvelle qui pousse au milieu de son front. Comment comprendre ? « Doctus cum libro » (savant avec les livres) dit-on en latin. Je cherchais donc. Quelle n’est pas ma surprise de ne trouver su internet que des explications qui viennent ou de sites protestants, ou de sites « illuminés ». Difficile de trouver une explication pertinente qui ne soit pas ou politique ou interprétation collant aux drames actuels !


Je me suis donc reporté au Commentaire sur Daniel (Chapitre IV) d’Hippolyte de Rome :


II. Comme ce sont des animaux variés et différents entre eux qui furent montrés au bienheureux Daniel, il faut penser que ce n'est pas d’animaux qu’il disserte, mais qu’en symbole et en image, il veut nous montrer les royaumes qui se sont élevés en ce monde, comme autant de bêtes dévorant l'humanité. La grande mer, c’est l'ensemble du monde. Les quatre vents du ciel signifient les quatre parties du monde créé. Le passage je vis quatre bêtes monter de la mer fait allusion aux empires de ce monde. La première était comme une lionne et elle avait des ailes comme un aigle : la lionne de l’empire de Babylone commandé alors par Nabuchodonosor. Elle avait des ailes comme un aigle signifie que le roi monta et s’éleva contre Dieu, en s’enflant dans son cœur parce qu'il était devenu grand et illustre. Ensuite Daniel dit : Les ailes lui furent arrachées. Elle fut élevée de terre et placée sur des pieds d'homme et un cœur d’homme lui fut donné. C’est bien ce qui arriva au temps de Nabuchodonosor, comme nous l’avons expliqué dans le livre précédent. Et le roi rend lui-même témoignage de ce qui lui est arrivé : il a été chassé de son royaume. On lui a enlevé la gloire et la grandeur dont il jouissait auparavant. Tout oiseau à qui on arrache les ailes est réduit à l’impuissance et devient une proie facile : de même se détachèrent du roi les forces armées, qui étaient la raison de son orgueil et de sa gloire. C’est par crainte d’être mis à mort par elles qu’il s’enfuit dans le désert. Elle fut placée sur des pieds d’homme et un cœur d’homme lui fut donné. Ces mots signifient que Nabuchodonosor s’humilia et reconnut qu’il n’était qu'un homme soumis à la puissance de Dieu et que, grâce à ses prières, il obtint du Seigneur miséricorde et rétablissement dans sa royauté et sa gloire. C’est de cela qu’il témoigne quand il dit : Et après la fin de ces jours, moi, Nabuchodonosor, je levai les yeux vers le ciel, et mes sens revinrent en moi et je bénis le Très-Haut, et je louai celui qui vit dans les siècles, et je le glorifiai, parce que sa puissance est puissance éternelle, et sa royauté passe de génération en génération, et tous les habitants de la terre ont été jugés comme rien, et ils ne sont rien. Quand son règne cessa à l’époque de Baltasar, et quand Baltasar lui aussi eut été tué pendant la nuit à cause de ce qu’il avait fait comme on l’a raconté dans le livre précédent, ce fut Darius le Mède qui reçut la royauté,à l'âge de soixante-deux ans. C’est donc avec raison que le prophète nous dit que monte une autre bête, l’ours, qui figure l’empire des Perses. Et, dit-il, il y avait trois rôles dans sa gueule. Les trois côtes signifient les trois pays des nations commandées par la bête : la Médie, l’Assyrie et la Babylonie. Et on lui dit : lève-toi, mange beaucoup de chair. Car les Perses se levèrent à cette époque et dévastèrent tout le pays. Ils firent périr les nombreux hommes qu’ils avaient réduits en esclavage. La bête qu’est l’ours est un animal sordide et carnassier, qui déchire des ongles et des dents : ainsi fut l’empire des Perses, qui dura 230 ans. Certains historiens ont écrit qu’ils avaient dominé pendant 235 ans, jusqu’au règne de Darius, qu’Alexandre de Macédoine anéantit la septième année. C’est ainsi qu’Alexandre fit passer l’empire de la Perse à la Grèce, selon la parole de Daniel : Derrière cette bête je contemplais et voici une autre bête comme un léopard. Il avait quatre ailes d'oiseau au-dessus de lui et quatre têtes, et le pouvoir lui fut donné. Le léopard, c’est l’empire grec, commandé par Alexandre de Macédoine. Il a comparé les Grecs à un léopard, parce qu’ils ont un esprit pénétrant, et très inventif dans les raisonnements, mais durs de cœur. De même, le léopard. C’est un animal à la robe tachetée, mais subtil pour faire le mal et boire le sang humain.Quatre ailes d'oiseau, dit-il, sont au-dessus d'elle et la bête à quatre ailes. Car lorsque l’empire eut fini de s’élever, de s'accroître et d’être célèbre par le monde entier, il fut divisé en quatre royaumes. En mourant, Alexandre le partagea et le donna à quatre compagnons de sa race : Séleucus, Démétrius, Ptolémée et Philippe. Ceux-ci se ceignirent lors du diadème comme Daniel le prédit et comme il est écrit au premier livre des Macchabées.


IV. Les Hellènes tinrent donc l’empire pendant 300 ans. Mais le prophète veut encore me faire comprendre autre chose. Il parle ainsi : derrière je contemplais et voici une quatrième bête… (…) Après l’empire grec, aucun autre ne s'est élevé sinon celui qui possède encore de nos jours la domination et qui est solidement établi : c'est un fait évident pour tous. Il a des dents de fer, parce qu'il tue et met en pièces le monde entier par sa propre force, comme le fait le fer. Il écrasait avec ses pieds ceux qui restaient, parce qu’il ne reste plus aucun empire après lui. sauf les dix cornes qui poussent sur lui et la petite corne qui s’élève au milieu des autres et qui déracine les trois premières. Le prophète avait déjà prédit, à propos du léopard, qu'il avait quatre têtes, et c'est ce qui arriva : l'empire d’Alexandre avait été divisé en quatre royaumes. Il faut de même s'attendre à ce que dix cornes sortent de l'empire romain, quand le temps de la bête sera accompli, et que la petite corne, c'est-à-dire l'Antéchrist apparaisse subitement des autres cornes, que la justice soit supprimée de la terre et que le monde arrive à sa fin. Donc nous ne devons pas devancer la volonté de Dieu, mais au contraire prendre patience et prier de ne pas tomber en de tels temps. Et nous ne devons pas pour autant n’y pas croire, en nous disant que cela n'arrivera pas. Car si les prédictions des prophètes ne se sont pas réalisées, n'attends pas non plus que celle-ci se réalise. Mais puisque les premiers événements se sont réalisés en leur temps, selon les prédictions, ces derniers aussi se réaliseront. Quant à ceux qui demandent : Quand cela arrivera-t-il ?, ce sont des incroyants, des gens sans foi. Mais connaître à l’avance l’avenir et croire à la réalisation des prophéties, telle est la conduite d’un homme bienheureux, qui sait et qui se tait, parce qu’il ne veut encourir aucun blâme pour avoir trop parlé.


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