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XIIIe dimanche du temps ordinaire (A)

« Ces miracles ne toucheraient personne s’ils n’étaient pas étonnants, et ils ne seraient pas étonnants s’ils étaient habituels. » Saint Augustin




Élisée, la Sunamite et son mari,

Fernando Pèrez de Funes (Funes, c. 1153 – Calahorra, c. 1223),

Bible de Pampelune (Espagne),

Or, dessin et couleur sur parchemin, ms. 0108, folio 123v, 1197,

Bibliothèque municipale, Amiens (France)


Lecture du deuxième livre des Rois (2 R 4, 8-11.14-16a)

Un jour, le prophète Élisée passait à Sunam ; une femme riche de ce pays insista pour qu’il vienne manger chez elle. Depuis, chaque fois qu’il passait par là, il allait manger chez elle. Elle dit à son mari : « Écoute, je sais que celui qui s’arrête toujours chez nous est un saint homme de Dieu. Faisons-lui une petite chambre sur la terrasse ; nous y mettrons un lit, une table, un siège et une lampe, et quand il viendra chez nous, il pourra s’y retirer. » Le jour où il revint, il se retira dans cette chambre pour y coucher. Puis il dit à son serviteur : « Que peut-on faire pour cette femme ? » Le serviteur répondit : « Hélas, elle n’a pas de fils, et son mari est âgé. » Élisée lui dit : « Appelle-la. » Le serviteur l’appela et elle se présenta à la porte. Élisée lui dit : « À cette même époque, au temps fixé pour la naissance, tu tiendras un fils dans tes bras. »


Psaume 88 (89), 2-3, 16-17, 18-19)

L’amour du Seigneur, sans fin je le chante ; ta fidélité, je l’annonce d’âge en âge. Je le dis : C’est un amour bâti pour toujours ; ta fidélité est plus stable que les cieux.

Heureux le peuple qui connaît l’ovation ! Seigneur, il marche à la lumière de ta face ; tout le jour, à ton nom il danse de joie, fier de ton juste pouvoir.

Tu es sa force éclatante ; ta grâce accroît notre vigueur. Oui, notre roi est au Seigneur ; notre bouclier, au Dieu saint d’Israël.


Lecture de la lettre de saint Paul Apôtre aux Romains (Rm 6, 3-4.8-11)

Frères, ne le savez-vous pas ? Nous tous qui par le baptême avons été unis au Christ Jésus, c’est à sa mort que nous avons été unis par le baptême. Si donc, par le baptême qui nous unit à sa mort, nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, comme le Christ qui, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d’entre les morts. Et si nous sommes passés par la mort avec le Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui. Nous le savons en effet : ressuscité d’entre les morts, le Christ ne meurt plus ; la mort n’a plus de pouvoir sur lui. Car lui qui est mort, c'est au péché qu'il est mort une fois pour toutes ; lui qui est vivant, c'est pour Dieu qu'il est vivant. De même, vous aussi, pensez que vous êtes morts au péché, mais vivants pour Dieu en Jésus Christ.


Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 10, 37-42)

En ce temps-là, Jésus disait à ses Apôtres : « Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi ; celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi ; celui qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas n’est pas digne de moi. Qui a trouvé sa vie la perdra ; qui a perdu sa vie à cause de moi la gardera. Qui vous accueille m’accueille ; et qui m’accueille accueille Celui qui m’a envoyé. Qui accueille un prophète en sa qualité de prophète recevra une récompense de prophète ; qui accueille un homme juste en sa qualité de juste recevra une récompense de juste. Et celui qui donnera à boire, même un simple verre d’eau fraîche, à l’un de ces petits en sa qualité de disciple, amen, je vous le dis : non, il ne perdra pas sa récompense. »


Le manuscrit

Fernando Pérez (ou Ferrando Petri) de Funes était un chanoine de la cathédrale de Calahorra qui est devenu entre 1192 et 1194 chancelier du roi navarrais Sancho VI El Sabio. À la mort du monarque en 1194, son successeur, Sanche VII le Fort, lui commande la réalisation d’une Bible qui se termine en 1197. Cette Bible, communément appelée Bible du Roi Sancho ou Première Bible de Pampelune, se trouve actuellement à la Bibliothèque Municipale d’Amiens.


À la fin, le monarque lui commande un nouvel exemplaire de la Bible, comme cadeau pour une femme de haut rang, qui pourrait être sa sœur Doña Berenguela à son mariage avec Ricardo Corazón de León, ou pour sa mère, Doña Sancha de Castilla.


Les manuscrits de Ferrando Petri peuvent être considérés comme des œuvres exceptionnelles dans toute la miniature du haut-âge européen. Contrairement aux autres auteurs, qui attachent plus d’importance au texte qu’aux images et que la plupart d’entre elles intercalent dans le texte, les Bibles de Pampelune basent tout le contenu sur les miniatures, qui forment des scènes de demi-page ou page entière, avec le nom des personnages qui apparaissent dans l’image, auxquels ne sont ajoutés ultérieurement que de courts textes explicatifs, qui ont leur origine dans une version de la Vulgate originale, le tout écrit en caractères gothiques minuscules.


Dans ses 271 feuillets de parchemin, dont 33 des 46 livres de la Bible, on trouve jusqu’à 976 scènes présentées sous forme de vignettes à main levée une fois les images et le texte terminés. Elles sont dessinées à plume fine et colorées à l’aquarelle dans des tons doux, essentiellement verdâtres, jaunes et ocres, en utilisant également dans 61 d’entre elles le pain d’or. Les spécialistes considèrent que trois scribes et au moins quatre peintres ont participé à sa confection, dont l’un devait être Ferrando de Petri lui-même, qui de plus était chargé de sélectionner et d’adapter les textes, et de trier les illustrations.


Avec une composition générale harmonieuse et expressive et un tracé énergique du dessin, les miniatures, dans lesquelles selon la tradition l’artiste a utilisé comme modèles des personnes de son environnement habituel, offrent des scènes parfois très complexes et de grand réalisme et originalité. Tout cela dans un style qui, bien que présentant, comme la plupart de la miniature du haut-âge espagnol, de multiples influences de diverses époques et origines, en plus d’une forme de présentation et des formes d’utilisation du dessin et le coloris très inhabituel à son époque, la définit comme une œuvre entièrement romane.


Le codex contient l’Ancien et le Nouveau Testament, avec une large décrépitude des généalogies du Christ, et la représentation de 203 saints et saintes ordonnés chronologiquement, certains étroitement liés au Royaume de Navarre, comme ceux de saint Michel d’Aralar, Saint Saturnin, saint Nicolas, saint Martin, saint Zoilo et les saintes Nunilona et Alodia, ainsi qu’une annexe contenant les textes des évangiles apocryphes relatifs à la seconde venue du Christ. Mais il n’inclut pas l’Apocalypse de saint Jean, quelque chose de surprenant dans un manuscrit espagnol.


La deuxième Bible de Pampelune, tant par son contenu vaste, est le manuscrit de son époque avec le plus grand nombre de miniatures qui a été consacré comme pour sa structure spéciale en grandes vignettes avec très peu de texte et pour l’originalité et la vitalité de ses miniatures dessinées plume fine et colorées avec des aquarelles aux tons doux, ensemble de caractéristiques que nous retrouvons seulement dans d’autres œuvres de Ferrando Petri, est l’un des plus complets et intéressants manuscrits bibliques du moyen-âge espagnol.


Ce que je vois

Je me limiterai à la partie de l’image qui concerne notre texte : Élisée, la Sunamite et son mari. Notons d’abord que le texte inscrit sous l’image est un commentaire latin du deuxième Livre des Rois.


À gauche, assis sur un siège que l’on ne distingue pas, le prophète Élisée. Debout, il déborderait de l’image si sa taille est celle que nous imaginons. Il tient en main son bâton pastoral. Il figure un Tau, la dix-neuvième lettre de l’alphabet grec. On appelle ce bâton la croix de saint Antoine ou béquille de saint Antoine. Cet attribut ne trouve pas d’explication bien définie, en dehors du fait que le Tau est un signe de paix, de bénédiction, de prédestination divine. Ce bâton en Tau est aussi une autre forme de bâton pastoral très usité au moyen âge jusque vers le XIIIe siècle. Pour montrer son âge avancé, l’enlumineur lui a dégarni le crâne et donné une barbe longue et bien fournie. Quant à son vêtement, tunique crème et manteau vert, se verra réutilisé dans les couleurs des deux autres personnages.


En face de lui, la Sunamite et son mari. Le mari, plus jeune que le prophète, a droit à une chevelure bouclée et une barbe courte. Il sourit en se penchant délicatement vers son épouse et en lui prenant la main et le bras en signe d’encouragement.


Sa femme, vêtue d’une longue robe verte et le visage voilé d’une guimpe blanche, elle sourit à son mari, confiante en la parole du prophète qui va réaliser leur rêve d’avoir un enfant. Le miracle va s’accomplir.


Un miracle ?

Voilà un mot souvent galvaudé. Ou l’on en parle avec circonspection au sujet de Lourdes, ou on le voit comme le signe d’une légende médiévale, ou encore on le met à toutes les sauces, comme lorsqu’un gouvernement nous parle du miracle économique ! Pourtant, le mot a une signification bien singulière. Il est emprunté au latin miraculum (chose étonnante) lui même issu du verbe mirari qui signifie regarder avec étonnement. Pensons aux deux verbes français : mirer (regarder attentivement) et admirer (considérer quelqu'un ou quelque chose avec un sentiment d'étonnement mêlé de plaisir exalté et d'approbation, le plus souvent motivé par la supériorité qu'on lui reconnaît dans divers domaines de la vie intellectuelle, esthétique, morale, etc.), et au substantif vulgaire : les mirettes ! Le miracle est donc un événement qui se donne à voir et qui procure l’étonnement. Et au sein d’un monde tellement rationnel, cela ne peut que nous poser question :

  • Qu’est-ce qui se donne à voir ? Pourquoi sommes-nous étonnés ? Qui en est l’auteur ?

  • Existe-t-il encore des miracles ? En avons-nous encore besoin ? Et même y croyons-nous encore ?

Lourdes : 70e miracle reconnu

Reprenons-les une à une. Mais afin d’être plus concret et explicite, prenons l’exemple du dernier miracle reconnu à Lourdes. Le quotidien La Croix nous en fait le récit :

Soeur Bernadette Moriau, invitée à retirer ses appareils. Cette française, religieuse à Bresles (Oise), a été guérie à l'âge de 69 ans, le 11 juillet 2008. alors qu'elle souffrait d'une atteinte pluriradiculaire des racines lombaires et sacrées. Priant dans la chapelle de sa communauté quelques jours après un pèlerinage diocésain à Lourdes, elle revit dans son cœur un moment fort vécu dans la Basilique Saint Pie X lors du sacrement des malades : elle se sent alors invitée à retirer ces appareils, corset et attelle, qu'elle porte depuis près de vingt ans, et constate que son pied a repris une position normale. Passées les expertises médicales, sa guérison est reconnue miraculeuse par Mgr Jacques Benoît-Gonnin le 11 février 2018, jour de la fête de Notre-Dame de Lourdes.

En fait, les membres du Comité Médical International de Lourdes sont chargés d’expertiser, et éventuellement de « certifier » que le mode de guérison déclaré « inexpliqué » par le Bureau des Constatations médicales de Lourdes est réellement « inexpliqué dans l’état actuel des connaissances scientifiques ». Deux figures éminentes en témoignent :

Le docteur Theillier, qu’on a appelé aussi « le docteur miracle », a été nommé à la tête du Bureau de Lourdes en 1998. Il y a exercé jusqu'en 2009. Pendant ces onze ans il a identifié dix guérisons inexpliquées dont deux ont été par la suite reconnues comme guérisons miraculeuses par l'Église. Ces guérisons inexpliquées et ces miracles sont à chaque fois pour lui « un signe et un acte de l'amour de Dieu ». Il regrette que la médecine traditionnelle maintienne un fort dualisme entre le corps et l'esprit. A contrario, il se réjouit de voir les approches psychosomatiques se développer. À la fois catholique et scientifique, il a écrit plusieurs livres où il cherche à comprendre les interactions entre la science et la foi. Son successeur Alessandro de Franciscis se présente avec humour comme « le médecin le plus inutile du monde » puisque tous « ses patients » ont déjà été guéris ! Lorsqu'il est interrogé, il met toujours en avant la méthode scientifique d'investigation qui est menée pour reconnaître une guérison inexpliquée. Ces deux médecins comme tous ceux qui interviennent au cours du processus de reconnaissance de guérison inexpliquée bon avant tout parler leur formation scientifique. Ils restent cependant fascinés par ces expériences dont ils sont les témoins.

C’est ensuite à l’évêque, après avoir mené une enquête avec un tribunal diocésain, et avec l’aval de Rome, qu’il déclare la guérison comme reconnue miraculeuse. Il est amusant de voir que même nos évêques ont peur de ce mot puisqu’en 2011, Mgr Emmanuel Delmas, évêque d'Angers, a reconnu le caractère « remarquable » de la guérison de Serge François, un retraité angévin, sans pour autant qualifier cet évènement de « miracle » mais de « signe de Dieu ». Ça laisse pantois… Bientôt, on nous parlera de « clin d’œil » divin.


J’en reviens à ma première question :


Qu’est-ce qui se donne à voir ?

Peut-être serait-il bon de se rappeler cette célèbre citation (attribuée faussement à Conficius alors que ce n’est qu’un proverbe chinois) que beaucoup utilisent à tout va : « Quand le sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt. » Le miracle montre la lune, et beaucoup s’ingénient à ne regarder que le doigt. Et ce sous forme d’un continuel questionnement : comment est-ce possible ? La science peut-elle l’expliquer ? Est-ce une supercherie ? J’en passe et des meilleures. En fait, ce questionnement est révélateur d’un scientisme qui habite toujours notre époque, une sorte de refus de croire que quelque chose, ou quelqu’un de plus grand que nous puisse exister. L’orgueil humain est indéracinable, voulant toujours détenir, prendre plutôt que recevoir. J’y pense à chaque fois que je prends ma douche : quand je veux enserrer ma savonnette, elle me glisse des doigts ; alors que si je la reçois humblement, elle reste ! Donc, avant de chercher des réponses aux questionnements (bien légitimes en soi), il est bon de commencer par s’émerveiller (et j’oserais dire, même si c’est une supercherie !). L’émerveillement est la clef de la foi, la clef de notre humanité. S’émerveiller, c’est admirer ce qui est étonnant (on en revient à notre verbe initial). Et ce qui est étonnant, c’est ce qui crée un « coup de tonnerre » dans ma vie, ce qui me bouleverse.


Pourquoi sommes-nous étonnés ?

En effet, peut-on tout rationaliser ? Pourriez-vous me dire pourquoi vous aimez ? Est-ce une simple question d’échanges chimiques ou de phéromones ? Savez-vous pourquoi les fleurs sont belles ? Pouvez-vous m’expliquer ce que sont le beau, le bien et le vrai ? Pouvez-vous rendre concret l’infini ? Ou l’inéluctabilité du temps ? La liste pourrait être longue. Tout n’a pas d’explication. Il me faut l’accepter, reconnaître que je ne peux pas tout tenir ni dans ma main, ni dans ma tête ; reconnaître comme Iznogoud que je ne serai pas calife à la place du calife. Et peut-être simplement m’émerveiller, ne serait-ce que de la beauté…


Alors, ce qui se donne à voir ? « Un signe de Dieu » disait Mgr Delmas. Oui, mais plus encore. Le signe de la miséricorde de Dieu, de son amour éperdu pour l’homme, de sa volonté divine de nous faire entrer dans sa joie, de nous donner les moyens de nous convertir vers le beau, le bien, le vrai, de nous appeler à la déification. Regardons la lune plutôt que le doigt…


Qui en est l’auteur ?

Je me demandais qui était l’auteur des miracles. Dieu évidemment ! Mais comment ne pas ouvrir cette question ? Si Dieu en est toujours l’auteur, car (Lc 1, 37) « rien n’est impossible à Dieu », (Lc 18, 27 : « Ce qui est impossible pour les hommes est possible pour Dieu ») il peut user de médiations. Peut-être d’abord la science. Ne serait-ce qu’en aidant le scientifique à trouver ce qu’il cherche, voire par sérendipité (fait de faire par hasard une découverte inattendue qui s'avère ensuite fructueuse, notamment dans le domaine des sciences). Mais chacun d’entre-nous est aussi un instrument dans les mains de Dieu comme Jésus l’a attesté à ses apôtres (Jn 14, 12-14) :

Amen, amen, je vous le dis : celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais. Il en fera même de plus grandes, parce que je pars vers le Père, et tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils. Quand vous me demanderez quelque chose en mon nom, moi, je le ferai.


Oui, si nous y croyons, nous sommes capables de faire d’immenses choses. Le tout, comme disait Bernadette de Lourdes, est d’y croire : « Il suffit d’y croire »… J’en viens ainsi à ma deuxième question.


Existe-t-il encore des miracles ?

Le premier aspect est celui de la foi. Je lisais dans France catholique, sous la plume du Père Michel Gitton :

« À côté de ceux qui ne croient pas aux miracles, parce qu’ils ont décidé une fois pour toutes que cela ne peut pas exister, il y a ceux qui répugnent à admettre qu’on puisse en demander et même en obtenir car il ne serait pas digne d’un croyant de mobiliser la puissance divine pour un intérêt particulier. De toute façon, Dieu ne nous a pas promis le bonheur pour cette terre. (…) Rappelons d’abord qu’il y a infiniment plus de miracles qui se produisent à la prière des humbles et à l’invocation du nom de Jésus que nous n’en connaissons. Le miracle n’est exceptionnel que dans un monde qui s’est vidé de la foi et qui ne veut plus les voir. Les miracles sont une réalité de tous les jours : petits ou grands, ils jalonnent notre vie de prière et chacun de nous aurait beaucoup à dire sur ce chapitre. Surtout, le miracle est étroitement lié à la sainteté de notre vie. Ce n’est pas pour rien que l’Église, à côté de l’héroïcité des vertus, demande pour la canonisation d’un serviteur de Dieu un ou plusieurs miracles. Et ce n’est pas parce qu’un saint a plus de puissance d’intercession qu’un autre, parce qu’il saurait obtenir de Dieu ce que celui-ci refuse aux autres. C’est surtout qu’en lui l’humanité retrouve sa fluidité première. Le péché a provoqué une sorte de gel. Chaque individu s’est trouvé coupé des autres, possédant son espace à lui, juxtaposé aux autres. Comme le disent les Pères, le miroir s’est brisé en mille fragments qui ne renvoient qu’imparfaitement à Dieu son image. Or, quand l’amour de Dieu passe dans nos veines, nous sortons peu à peu de nos limites. La communion devient possible avec les autres, notre prière peut être un baume sur leurs plaies, notre intercession peut influer sur leur existence morale et même physique. »

Pas de miracle sans prière, pas de miracle sans foi inconditionnel en l’amour et la grâce de Dieu. Mais n’oublions jamais, au risque d’être dépité, que nous n’avons qu’une obligation de moyens, et non de résultat. Une nouvelle fois, je vous rappelle ce que dit Dieu au prophète dans le Deuxième Livre des Chroniques (20, 15) : « car ce combat n’est pas le vôtre, mais celui de Dieu ». Ce n’est pas nous qui sommes l’auteur du miracle. Ce n’est pas nous qui allons guérir telle personne malade. Ce ne peut être que Dieu. Et Dieu est libre de ses choix, de distribuer ses grâces à tel ou tel. L’évangile de Matthieu nous précise comment Dieu fait ses « choix »… en fonction de nos besoins (Mt 6, 8) : « car votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant même que vous l’ayez demandé ». Quant à nous, (Ph 4, 6) : « Ne soyez inquiets de rien, mais, en toute circonstance, priez et suppliez, tout en rendant grâce, pour faire connaître à Dieu vos demandes ». Voilà notre obligation de moyens : prier sans cesse. Peut-être même en « usant » Dieu de nos prières, comme la veuve le fit devant le juge inique (Lc 18, 5) : « comme cette veuve commence à m’ennuyer, je vais lui rendre justice pour qu’elle ne vienne plus sans cesse m’assommer ». Seules la foi, l’espérance et la prière confiante peuvent faire « céder » Dieu !


Y croyons-nous encore ?

Il n’en reste pas moins deux questions : y croyons-nous encore ? Et en ressentons-nous encore le besoin ? Il me semble que nous y croyons, mais nous avons peur de l’échec. Permettez-moi ce modeste témoignage. Après mon ordination, je pris quelques jours de repos en Bretagne. Un soir, me voilà seul à marcher le long de la plage. Et je repense à deux épisodes de l’évangile. D’abord à celui que j’ai évoqué plus haut (celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais. Il en fera même de plus grandes) et à Pierre effrayé puis appelé par le Christ à le rejoindre en marchant sur l’eau. Et bêtement, je me dis que si ma foi est assez forte, je pourrais moi-même marcher sur les eaux. D’autant plus que personne ne pouvait me voir ! Mais jamais je n’ai osé mettre un pied sur l’eau. Par peur, peur que ça ne marche pas (c’est le cas de le dire). Je manquais de foi. Mais aujourd’hui, je vois cet événement autrement. De toutes les façons, je n’aurais jamais réussi. Pourquoi ? Parce que ce geste n’avait aucun intérêt. À la limite, si c’était pour sauver quelqu’un qui se noyait, peut-être. Mais si ce n’était que pour évaluer ma foi, le risque était celui de m’enorgueillir, et cela, Dieu ne l’eut permis. En fait, il me semble même que le miracle n’est destiné qu’aux autres ! Ainsi, à Lourdes, comme brancardier, j’accompagnais une femme qui avait toutes les maladies du monde. Lors de la procession eucharistique, je la vois prier avec une intensité qui m’a ému. Je lui demande, stupide que je suis, si elle espérait un miracle par sa prière devant le Saint-Sacrement. « Oui, me répondait-elle. Mais je ne priais pas pour moi, mais pour le pauvre enfant handicapé dans son siège à côté de moi. » Belle leçon d’humilité. Et cette guérison aurait pu se produire…


En ressentons-nous encore le besoin ?

Je termine ce questionnement par la deuxième partie : en ressentons-nous encore le besoin ? Comme l’écrivait le Père Gitton : « il y a ceux qui répugnent à admettre qu’on puisse en demander et même en obtenir car il ne serait pas digne d’un croyant de mobiliser la puissance divine pour un intérêt particulier ». Autre type d’orgueil en fait : ne pas se croire digne de bénéficier d’un miracle. Mais aussi erreur théologique qui refuse de demander à Dieu de s’abaisser jusqu’à nous. N’est-ce pas nier, d’une certaine façon, l’Incarnation ? Et encore plus, faire abstraction des recommandations de Jésus. Quelques exemples :

  • Mt 7, 7 : « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. »

  • Mc 11, 24 : « C’est pourquoi, je vous le dis : tout ce que vous demandez dans la prière, croyez que vous l’avez obtenu, et cela vous sera accordé. »

  • Jn 15, 7 : « Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voulez, et cela se réalisera pour vous. »

  • Jn 16, 24 : « Jusqu’à présent vous n’avez rien demandé en mon nom ; demandez, et vous recevrez : ainsi votre joie sera parfaite. »

  • Mot 7, 9-11 : « Lequel d’entre vous donnera une pierre à son fils quand il lui demande du pain ? ou bien lui donnera un serpent, quand il lui demande un poisson ? Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent ! »

  • Lc 11, 5-8 : « Jésus leur dit encore : « Imaginez que l’un de vous ait un ami et aille le trouver au milieu de la nuit pour lui demander : “Mon ami, prête-moi trois pains, car un de mes amis est arrivé de voyage chez moi, et je n’ai rien à lui offrir.” Et si, de l’intérieur, l’autre lui répond : “Ne viens pas m’importuner ! La porte est déjà fermée ; mes enfants et moi, nous sommes couchés. Je ne puis pas me lever pour te donner quelque chose.” Eh bien ! je vous le dis : même s’il ne se lève pas pour donner par amitié, il se lèvera à cause du sans-gêne de cet ami, et il lui donnera tout ce qu’il lui faut. »

Avez-vous encore besoin d’exemples ? Oui, nous avons besoin des miracles. Oui, il nous est nécessaire de demander à Dieu son aide, même et surtout quand la situation nous semble désespérée. N’est-il pas l’espérance ? Non, il n’y a aucune honte à demander quelque chose à Dieu, si impossible cela paraît à nos yeux. N’hésitons pas non plus à faire appel à l’appui des saints, comme dans cette belle prière à Saint-Joseph de saint François de Sales :

Glorieux saint Joseph, époux de Marie, accordez-nous votre protection paternelle, nous vous en supplions par le Cœur de Jésus-Christ et le Cœur Immaculé de Marie. Ô vous dont la puissance infinie s’étend à toutes nos nécessités et sait nous rendre possibles les choses les plus impossibles, ouvrez vos yeux de père sur les intérêts de vos enfants. Dans l’embarras et la peine qui nous pressent, nous recourons à vous avec confiance ; daignez prendre sous votre charitable conduite cette affaire importante et difficile, cause de notre inquiétude : ... Faites que son heureuse issue tourne à la gloire de Dieu et au bien de ses dévoués serviteurs.

Reconnaître ce besoin c’est combattre notre orgueil et prendre ainsi le chemin de l’humilité, cette humilité de croire que Dieu est plus grand que nous et que sans lui, nous ne privons pas grand chose.


Et enfin

Et enfin, comprenons bien une chose : le miracle se donne à voir. Parfois aux yeux de tous, comme ce fut le cas à Fatima avec la danse du soleil. Mais la plupart du temps, uniquement aux yeux de celui pour qui c’est important, aux yeux de ceux qui ont la foi. Et si nous avons l’impression qu’il y a moins de miracles, les causes en sont peut-être multiples sans être exclusives :

  • Nous manquons de foi et de sainteté,

  • Nous ne prions pas suffisamment,

  • Nos yeux ne regardent pas où il faut.

En tous les cas, c’est un appel à la sainteté comme le rappelait le Père Michel Gitton : « Surtout, le miracle est étroitement lié à la sainteté de notre vie. Ce n’est pas pour rien que l’Église, à côté de l’héroïcité des vertus, demande pour la canonisation d’un serviteur de Dieu un ou plusieurs miracles. Et ce n’est pas parce qu’un saint a plus de puissance d’intercession qu’un autre, parce qu’il saurait obtenir de Dieu ce que celui-ci refuse aux autres. C’est surtout qu’en lui l’humanité retrouve sa fluidité première. »

« Ces miracles ne toucheraient personne s’ils n’étaient pas étonnants, et ils ne seraient pas étonnants s’ils étaient habituels. » Saint Augustin


Prière pour les miracles de Lourdes

Seigneur, nous venons à vous pour vous remercier pour les nombreux miracles qui ont eu lieu à Lourdes.

Nous vous remercions pour la guérison physique et spirituelle que vous avez accordée à tant de personnes qui ont cherché votre aide.

Nous vous remercions pour votre amour et votre miséricorde infinie qui ont été manifestés à travers ces miracles. Nous vous demandons de continuer à bénir Lourdes et de protéger cet endroit saint.

Nous vous demandons de guider tous les pèlerins qui viennent à Lourdes, et de leur donner la force et la paix qu'ils cherchent.

Nous vous demandons de bénir les médecins et les scientifiques qui étudient les guérisons de Lourdes, et de les aider à comprendre votre pouvoir de guérison. Nous vous remercions pour toutes les bénédictions que vous nous avez données à travers les miracles de Lourdes et nous vous confions notre vie et notre santé.

Amen


Acte d’espérance

Mon Dieu, j’espère avec une ferme confiance que Vous me donnerez, par les mérites de Notre-Seigneur Jésus-Christ, Votre grâce en ce monde et le bonheur éternel dans l’autre, parce que Vous l’avez promis et que Vous êtes toujours fidèles dans Vos promesses.


Homélie de saint Augustin (+ 430), Sermon 98, 1-3; PL 38, 591-592.

Les miracles de notre Seigneur et Sauveur, Jésus Christ, font certainement impression sur tous les croyants qui les entendent raconter. Mais cette impression n'est pas la même pour tous. Les uns s'extasient devant ses miracles matériels, mais n'ont pas l'intelligence d'autres miracles plus grands encore. Les autres s'émerveillent bien davantage de voir s'accomplir aujourd'hui dans les âmes les miracles que le Christ a opérés dans les corps.


Que personne donc, s'il est chrétien, ne doute qu'aujourd'hui encore des morts ressuscitent. Tout homme, il est vrai, a des yeux qui lui permettent de voir un mort ressusciter, comme le fils de la veuve, dont parle l'évangile qui vient d'être lu. Quant à voir ressusciter des hommes morts spirituellement, tous n'en sont pas capables. Seuls le peuvent ceux qui sont déjà eux-mêmes ressuscités spirituellement. Ressusciter quelqu'un pour la vie éternelle est un miracle plus grand que de ressusciter quelqu'un qui est destiné à mourir une seconde fois.


La veuve, mère de ce jeune homme, s'est réjouie de sa résurrection. L'Église, notre mère, se réjouit de voir chaque jour des hommes ressusciter spirituellement. Lui, il était mort de la mort du corps ; eux, de la mort de l'âme. Sa mort visible avait donné lieu à des lamentations publiques, puisque leur mort invisible n'a attiré ni l'attention ni les regards des hommes. Le seul à se soucier d'eux était celui qui les savait morts, et le seul qui les savait morts était celui qui pouvait leur rendre la vie.


Oui, vraiment, si le Seigneur n'était pas venu ressusciter les morts, l'Apôtre n'aurait pas pu dire : Réveille-toi, ô toi qui dors, relève-toi d'entre les morts, et le Christ t'illuminera (Ep 5,14).


Quand tu l'entends dire : Réveille-toi, ô toi qui dors, tu penses que quelqu'un est en train de dormir. Mais les mots suivants : Relève-toi d'entre les morts te font comprendre qu'il s'agit bien d'un mort. Des morts visibles aussi, on dit souvent qu'ils dorment. De toute évidence, ils dorment tous pour celui qui a le pouvoir de les réveiller.


Pour toi, un mort est réellement mort : tu as beau le secouer à ton gré, le pincer, mettre son corps en pièces, il ne se réveillera pas. Mais pour le Christ qui a dit au jeune homme : Lève-toi (Lc 7,17), celui-ci était en train de dormir, et il s'est levé aussitôt. Il est plus facile au Christ de faire lever un mort de sa tombe qu'à quiconque de réveiller un homme dans son lit. <>


En vérité, notre Seigneur Jésus Christ voulait que ses actions visibles soient également comprises dans leur sens spirituel. Or il n'opérait pas de miracles pour faire des miracles seulement, mais pour que ses oeuvres soient un sujet d'admiration pour ceux qui les voyaient, et une source de vérité pour ceux qui les comprenaient. Prenons un exemple. Celui qui voit dans un livre des lettres d'une belle écriture, mais ne sait pas lire, peut bien admirer la beauté des caractères et louer la dextérité du copiste : il ne sait pas ce que ces lettres signifient ni ce qu'elles représentent. Ainsi, il loue ce que voient ses yeux, mais son esprit ne saisit rien. Un autre, en revanche, loue l'habileté du scribe et comprend le sens des mots. Il voit, bien sûr, le texte que tous peuvent voir, mais en outre il peut le lire : ce qui est impossible au premier, qui ne l'a pas appris.


De même, parmi ceux qui ont vu les miracles du Christ, les uns n'ont pas compris ce qu'ils signifiaient, ni ce qu'ils enseignaient, d'une certaine manière, à ceux qui en avaient l'intelligence ; ils n'ont fait qu'admirer de simples faits matériels. Les autres sont tombés en admiration devant ces prodiges et ont compris en outre ce qu'ils signifiaient. À l'école du Christ, nous devons leur ressembler.


Homélie de Mgr Francesco Follo pour le XIIIe Dimanche du Temps ordinaire – Année B – 28 juin 2015


1) Une foi qui guérit et sauve.

Le long passage de l’Evangile de ce dimanche relate deux miracles encastrés l’un dans l’autre : la guérison d’une femme souffrant de pertes de sang, et la résurrection de la fille du chef de la synagogue, Jaïre. La foi est le fil rouge qui unit ces deux miracle, une foi qui non seulement guérit et redonne la vie, mais sauve en donnant à la vie toute sa plénitude.


Comme dit le pape François : « À l’homme qui souffre, Dieu ne donne pas un raisonnement qui explique tout, mais il offre sa réponse sous la forme d’une présence qui accompagne, d’une histoire de bien qui s’unit à chaque histoire de souffrance pour ouvrir en elle une trouée de lumière » (Lumen Fidei, 57).


En effet, l’épisode évangélique du jour montre que Jésus partage la douleur de Jaïre, un des chefs de synagogue, dont la fille de 12 ans est gravement malade, et qu’il partage les souffrances de la femme malade.


Arrêtons-nous un instant sur cette scène. Jaïre, qui a entendu parler des guérisons de Jésus, sans se préoccuper ni de sa position sociale ni de son rôle influent, se jette aux pieds du Nazaréen et le supplie instamment de venir imposer ses mains sur sa petite fille pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive. Jésus accepte et se dirige vers la maison de Jaïre. Mais voilà que dans la foule qui les écrasait de toute part, s’avance une femme, souffrant depuis 12 ans de fortes pertes de sang ; la pauvrette avait dépensé tout ce qu’elle avait chez les médecins sans obtenir la moindre amélioration, au contraire son état avait plutôt empiré.


Le miracle de la guérison de la femme souffrant de pertes de sang aurait été parfait pour souligner la puissance de Jésus. Il lui avait suffi de toucher son vêtement pour guérir. Mais saint Marc ne s’arrête pas là, il veut attirer l’attention aussi sur la stupeur des disciples : « Tu vois bien la foule qui t ‘écrase et tu demandes : « Qui m’a touché ? ».


Pourquoi Jésus donne-t-il de l’importance au geste de cette femme qui ne veut pas se faire remarquer et touche à peine le manteau que Jésus a sur le dos ? Il faut savoir que la loi de Moïse déclarait impure la femme qui avait des pertes de sang, et celui qui la touchait devenait impur. Voilà pourquoi la femme touche le vêtement de Jésus en cachette, profitant de la foule, et pourquoi elle se sent si coupable, est si pleine de crainte et si tremblante, quand on la découvre. Et c’est la seule raison pour laquelle Jésus fait savoir ce qui se passe : pour déclarer publiquement, devant tout le monde, que d’avoir été touché par la femme ne fait pas de lui un homme impur, que la foi va au-delà de ce qui est pur et impur selon la loi. Ainsi, publiquement, le Sauveur dit à la femme qui lui a « volé » le miracle : « Va en paix, ta foi t’a sauvée ».


La foi est au centre également de la guérison de Jaïre : « Ne crains pas, crois seulement ». Croire en la puissance de Jésus, une puissance capable de t’atteindre là où tu es, dans ta situation du moment, victorieuse jusque dans la mort. Mais dans ce récit Marc souligne un autre détail : « La petite fille n’est pas morte, elle dort ». Le grand miracle c’est la victoire sur la mort, comme nous le rappelle le psaume : « Le Seigneur te guérit de toute maladie, il réclame ta vie à la tombe et te couronne d’amour et de tendresse » (103,3-4). En effet, le salut ne serait pas entier s’il n’était pas pour toujours.


Jésus, après avoir démenti les paroles des hommes, qui avaient dit que l’enfant était morte, et après les avoir tous envoyés dehors, donne un nouveau nom à la mort. Sa parole est plus importante que celle des hommes. La Parole de Dieu redonne la vie, la donne à jamais.


2) LA FOI : une question d’intelligence et de cœur, une manière de vivre et pas seulement de penser.

Comme nous le voyons, ce n’est pas tant sur les deux miracles que porte l’attention mais sur la foi de ceux qui les demandent. La foi est indispensable au miracle. Jésus ne fait pas de miracles pour forcer, à tout prix, le cœur de l’homme. Les miracles sont des signes qui servent la foi, mais ils ne diminuent pas le courage de croire. Les miracles sont un don, une réponse à la sincérité et à la pureté du cœur de l’homme qui cherche le Seigneur et mendie la guérison du corps et de l’âme.


Jésus n’accomplit pas de miracles, là où les hommes prétendent fixer eux-mêmes les façons d’agir de Dieu. Le miracle est la libre réponse de Dieu à la mendicité de la créature humaine.


Hélas, souvent nous sommes aveugles devant tant de signes que Dieu accomplit, nous n’avons pas le cœur ouvert pour les déchiffrer et le courage de nous décider, alors nous nous excusons et en prétendons d’autres. Nous demandons de nouveaux signes, toujours de nouveaux signes, et pendant ce temps-là nous ne voyons pas les nombreux signes que Dieu a déjà semés – de sa propre initiative – le long du chemin de l’histoire et de notre vie.


Nous devons demander mais d’un cœur pur et avec componction. Le mot « componction » devient très expressif si nous pensons à son étymologie: il signifie en effet brûlure provoquée par une piqure. Cette brûlure qui provoque en nous l’amour de Dieu manifesté en Jésus touche notre cœur de pécheur. La componction ne renvoie ni au sens de la faute ni aux scrupules, mais à l’amour, car elle vient de la considération que Dieu nous aime et que « le Christ est mort pour nous, alors que nous étions encore pécheurs » (Rm, 5, 8).


Le contraire de la peur ce n’est pas le courage, c’est la foi. L’important est de persévérer et de faire grandir cette foi en nous. Même quand le doute nous assaille, même si notre foi n’a rien d’héroïque, laissons la Parole de Dieu habiter notre cœur, laissons le Nom du Christ monter à nos lèvres avec cette même obstination qu’ont les amoureux.


La foi est un acte très humain, vital, qui tend vers la vie et s’oppose à la mort. La foi est un acte de l’intelligence et un abandon de la volonté, qui nous colle à Dieu comme un enfant colle au sein de sa mère, puis comme des enfants au cœur sevré par leur mère nous restons dans les bras de Dieu pleins de confiance.


« La foi est proprement une réponse au dialogue de Dieu et à sa Parole, à sa Révélation. C’est le « oui » qui permet à la pensée divine d’entrer dans la nôtre. La foi est un acte qui se fonde sur le crédit que nous faisons au Dieu vivant, c’est l’acte d’Abraham qui croyait à Dieu et qui obtint par là son salut. La foi est un acte et de conviction et de confiance qui envahit toute la personnalité du croyant et engage sa manière de vivre. » (Paul VI, novembre 1966).


Il est donc juste de nous demander, aujourd’hui, jusqu’où va notre foi : s’il s’agit d’une attitude superficielle qui ne donne aucun crédit à Sa toute puissance ou « une manière de vivre Dieu ».


Les Vierges consacrées dans le monde témoignent que la foi est une manière de vivre Dieu. Leur vie de vierges est un témoignage de l’amour de Dieu et une manifestation de la sagesse du cœur reçue de Jésus Christ. En se donnant totalement à Dieu ces femmes « prêchent l’Evangile de la Virginité », selon lequel « la foi n’est pas un objet de décor, un ornement ; vivre la foi n’est pas orner la vie d’un peu de religion » (Pape François), mais c’est un critère de base pour vivre vraiment. Avec humilité et une foi amoureuse, les Vierges consacrées dans le monde se sont données au Christ, dont elles écoutent la Parole avec constance grâce à une lecture assidue de la Bible et avancent dans le monde comme évangile de la Virginité « afin d’aimer le Christ avec ardeur et aider les frères plus librement et avec plus de dévouement » (Préambule du Rituel de la consécration des Vierges). C’est pourquoi l’exhortation apostolique Vie consacrée leur attribue une sorte de « magistère spirituel » qui fait d’elles des sortes « d’expertes en vie spirituelle » (Vie consacrée, n. 55). Elles nous apprennent à vivre la foi avec le cœur, à écouter sa Parole.

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