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Mardi, 18ème semaine du T.O. — année impaire

Confiance !



Jésus marchant sur les eaux

Francis Danby (County Wexford, 1793 - Exmouth, 1861)

Huile sur toile, 148 x 221 cm, 1826

Musée du Louvre, Paris (France)


Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 14, 22-36)

Jésus avait nourri la foule dans le désert. Aussitôt il obligea les disciples à monter dans la barque et à le précéder sur l’autre rive, pendant qu’il renverrait les foules. Quand il les eut renvoyées, il gravit la montagne, à l’écart, pour prier. Le soir venu, il était là, seul. La barque était déjà à une bonne distance de la terre, elle était battue par les vagues, car le vent était contraire. Vers la fin de la nuit, Jésus vint vers eux en marchant sur la mer. En le voyant marcher sur la mer, les disciples furent bouleversés. Ils dirent : « C’est un fantôme. » Pris de peur, ils se mirent à crier. Mais aussitôt Jésus leur parla : « Confiance ! c’est moi ; n’ayez plus peur ! » Pierre prit alors la parole : « Seigneur, si c’est bien toi, ordonne-moi de venir vers toi sur les eaux. » Jésus lui dit : « Viens ! » Pierre descendit de la barque et marcha sur les eaux pour aller vers Jésus. Mais, voyant la force du vent, il eut peur et, comme il commençait à enfoncer, il cria : « Seigneur, sauve-moi ! » Aussitôt, Jésus étendit la main, le saisit et lui dit : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? » Et quand ils furent montés dans la barque, le vent tomba. Alors ceux qui étaient dans la barque se prosternèrent devant lui, et ils lui dirent : « Vraiment, tu es le Fils de Dieu ! » Après la traversée, ils abordèrent à Génésareth. Les gens de cet endroit reconnurent Jésus ; ils firent avertir toute la région, et on lui amena tous les malades. Ils le suppliaient de leur laisser seulement toucher la frange de son manteau, et tous ceux qui le faisaient furent sauvés.


Méditation

Jésus : Un de mes saints dira d’ici quelques siècles que « le prêtre est un homme mangé ». Comme moi ! Cette foule me dévore. Avant que je ne lui donne ma vie à manger à la dernière Cène, j’ai besoin de ce temps de solitude avec mon Père. Être seul avec le Seul. C’est curieux comme les hommes ont peur de cette solitude. Auraient-ils peur de se retrouver face à face avec Dieu ? Croient-ils qu’ils mourront en voyant cette sainte Face Trinitaire ? Pourtant, l’amour n’est-il pas un éternel face à face, un échange de regards qui en dit bien plus que les paroles. Ces paroles qui peuvent éteindre La Parole. Je suis là, sur cette montagne où mon Père s’est toujours donné à voir et à entendre, même dans le silence d’une brise légère. Je suis là, avec Lui, dans le silence. Ah, si les hommes prenaient le temps du silence ! S’ils prenaient le temps de laisser décanter leur vie, telle une eau agitée, pour en distinguer le trouble du clair. S’ils prenaient le temps d’écouter le silence. S’ils prenaient le temps d’écouter non pas ce qui résonne à l’extérieur comme un airain, mais ce qui résonne à l’intérieur : la présence divine. Dans quelques siècles, j’inspirerai à un écrivain russe cette phrase : « La beauté sauvera le monde ». Puissent les hommes comprendre que la beauté ne se perçoit que dans le silence, et que le silence est une vraie beauté. Merci, Père de révéler cela aux petits avant de le faire comprendre aux savants. Ce sont ces petits que je vais maintenant rejoindre, eux qui se battent contre le Diable qui vient de soulever la tempête sur le lac.


Pierre : On n’y arrivera jamais. La tempête est trop forte. Nous naviguons sur notre tombeau et il va bientôt nous engloutir pour l’éternité. Et Jésus qui n’est pas là… Mais que fait-il donc ? Pourquoi n’est-il pas avec nous ? C’est maintenant que nous aurions besoin de lui, et voilà qu’il nous abandonne. Mais… qu’est-ce donc ? Ce n’est pas possible ! Quelqu’un qui marche sur les eaux ! En plus de cette diabolique tempête voici que nous devrons affronter le Malin sous la forme d’un fantôme… Au secours !


Jésus : Ce pauvre Pierre, toujours à s’inquiéter ! Et tant de difficultés à lâcher les rênes, à faire confiance. Ne lui avais-je pas dit que je serai toujours avec eux ? Mais il reste quand même bien terre à terre, ou plutôt mer à mer… Rassurons-le ! Aie confiance, mon frère. C’est moi, Jésus ! Plus de raison d’avoir peur.


Pierre : Serait-ce lui ? Comment en être sûr ? Comment avoir confiance ? La seule façon de vaincre ma peur est de me lancer dans une plus grande peur, comme celle de me jeter à l’eau, de marcher comme lui sur l’eau, moi qui ne sais pas nager. Et il me prend au mot ! Bon, un peu de courage, allons-y… Mais… bon sang ! Ça marche (c’est le cas de le dire) ! Avançons vers lui. Il me fixe du regard, un léger sourire à la commissure des lèvres. Il doit être fier de moi. C’est vrai, il y a de quoi : je marche sur les eaux ; ce n’est pas rien quand même. Je suis le meilleur ! Ô mon Dieu, je m’enfonce…


Jésus : Ah Pierre, pourquoi t’enorgueillir… Pourquoi penser que ce miracle vient de tes propres forces, de tes capacités, si grandes soient-elles ? Pourquoi ne comprends-tu pas que c’est moi qui te fait marcher sur les eaux, que c’est mon regard qui te soutient au-dessus de la mort éternelle ? Pourquoi faut-il que tu te regardes, croyant réaliser un exploit ? Pourquoi faut-il que tu prennes peur devant les vents et la mer démontée ? Pourquoi ne me regardes-tu plus ? Pourquoi ne puises-tu plus ta force dans mes yeux ? La peur paralyse toujours les hommes. L’orgueil leur fait faire des folies, et la peur les paralyse devant l’évidence. Dès le commencement, il en était ainsi : Adam et Ève, orgueilleux au point de croire qu’ils pourraient devenir des dieux. Puis apeurés de leur bêtise se cachant à l’appel de Dieu. S’ils avaient la foi grosse comme une graine de sénevé, ils diraient à la mer de se calmer et de les porter, elle leur obéirait. S’ils avaient la foi grosse comme une graine de moutarde, ils diraient à leur tempête intérieure, à leurs peurs humaines « tais-toi ! » et elle disparaîtrait. Mais ils n’osent pas faire le saut de la foi… à peine enjambée la barque, ils s’affolent. Mais je ne t’en veux pas Pierre. Je t’en veux d’autant moins que tu m’as appelé. Sans moi, tu n’es rien, ou si peu. Sans moi, tu ne peux rien faire, ou si peu. Alors, je vais te saisir, te prendre par le poignet, comme pour Adam et Ève que je sauverai ainsi des enfers. Parce que je t’aime, Pierre. Je t’aime avec tes faiblesses, avec ta couardise mêlée de témérité. C’est aussi pour ça que je t’ai choisi. C’est aussi pour ça que tu mèneras mon Église plus tard. Avec force et faiblesse. Comme pour lui rappeler qu’elle est forte de Dieu et faible d’humanité. Pour lui rappeler qu’elle doit m’appeler au secours et que je la soutiendrai, dans la barque, contre les tempêtes. Oh, rassure-toi, Pierre, je ne t’en veux pas. Et c’est même avec le sourire et un peu d’amusement, comme une taquinerie, que je te demande pourquoi tu as douté : ça marchait !


Pierre : Ô mon Dieu, suis-je bête ! Pourquoi mes yeux, au lieu de le regarder, ce sont-ils tournés sur moi ? Il a fallu que j’aie peur pour l’appeler. Pardonne-moi, Jésus, pour mes faiblesses humaines. Je sais que tu pourrais les transformer en force et en grâces. Tu me sors du gouffre des eaux. Retournons maintenant à la barque. Mais… tu me fais marcher sur l’eau pour revenir vers mes frères ! Malgré mes peurs et mes doutes, tu me restaures, tu me rends les grâces que j’avais gâchées. Ta bonté est incommensurable… comme ma peur !


Jésus : Pierre, garde une leçon en ton coeur : ne détache jamais tes yeux de mon regard. C’est ma sainte Face qui te sauvera des tempêtes quotidiennes. Et quand tu coules, crie vers moi, et je te sauverai.

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